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ÉTABLISSEMENT THERMAL DE LA SOURCE LITHIUM

21 - Santenay

avenue des Sources

  • Dossier IA21005783 réalisé en 1978 revu en 2019
  • Auteur(s) : Claudine Hugonnet-Berger, Elisabeth Réveillon, Fabien Dufoulon, Marguerite Cinotti
Kiosque de dégustation commun aux sources Lithium et Carnot, état en 2019. © Région Bourgogne-Franche-Comté, Inventaire du patrimoine

Historique

Découverte de la source et début de son exploitation

La source Lithium est la première des trois sources artésiennes de Santenay à être découverte et exploitée. Elle se distingue de la Fontaine Salée, qui jaillit sur un terrain situé à 300 mètres au sud-ouest et dont l'exploitation a été autorisée une vingtaine d'années plus tôt. En 1888, Pierre Jean-Louis Gagey, négociant de Meilly-sur-Rouvres, procède à deux premiers forages au Pré Cernay et met à jour deux nappes d'une eau minérale à 81,1 et 87,7 mètres de profondeur dont le débit est abondant (65 000 litres par jour, soit dix fois plus que la Source Salée). Après un avis favorable de l'Académie de Médecine, il obtient l'autorisation de l'exploiter en 1890. Comme l'eau est particulièrement lithinée, c'est le nom "Lithium" qui est choisi pour désigner la source. Cette caractéristique se retrouve en France (Bourbonne-les-Bains, Contrexéville et Vittel) et à l'étranger (Martigny et Vals en Suisse, Bad Salzschlirf en Allemagne). Avec une concentration en chlorure de lithium de 0,11 gramme par litre, la nouvelle source de Santenay devient la première source de ce type en France. Ces eaux lithinées sont alors préconisées contre la goutte. Elles sont l'objet d'un certain intérêt de la part du monde médical de cette époque. Le célèbre pharmacien Antoine Mallat consacre ainsi sa thèse à celle de Vichy en 1882. Par ailleurs, des comprimés permettant d'obtenir chez soi une eau minérale artificielle (dont les plus célèbres sont les "lithinés" du docteur Gustin) sont commercialisés, ce qui n'est pas sans entraîner des conflits avec les stations thermales.
Le propriétaire du terrain, pressentant le succès futur de l'entreprise, évalue son bien à un prix exorbitant que Gagey est incapable de verser. L'affaire est près de tourner court quand Charles Thomas-Caraman, docteur exerçant à Forges-les-Eaux (Seine-maritime), se prend d'intérêt pour le site. Il agit pour le compte de la société Perrenod et Compagnie, basée à Demigny, dont l'activité principale est la fabrication de spiritueux aux extraits d'absinthe. Il trouve une autre parcelle, plus proche du Pâtis du Haut, terrain en contrebas de la propriété de la famille Lhomme que la commune accepte de lui louer. En 1892-1893, il fait faire un forage dont le débit s'avère encore plus abondant que celui obtenu par Gagey : la source produit 200 000 litres par jour. L'eau gazeuse jaillit à 19°C. Thomas-Caraman prend soin de publier immédiatement les résultats de sa découverte dans une brochure, Coup d’œil sur la source Lithium de Santenay (1893). Il y met en avant sa concentration en chlorure de sodium (5,64 grammes par litre, comparable à celle de Bourbonne-les-Bains) et en sulfate de soude (2,20 grammes par litre, comparable à celle de Carlsbad) pour montrer que son eau rassemble des propriétés variées, sans oublier bien sûr sa spécificité liée au chlorure de lithium.
Dans un premier temps, seul un magasin est construit (1893). L'eau est consommée sur place ou à domicile grâce à l'expédition de caisses de bouteilles depuis la gare de Santenay. Une caisse de 12 bouteilles coûte par exemple 6 francs. Dans sa brochure, Thomas-Caraman appelle de ces vœux la création d'un véritable établissement de bains et même d'un hôtel et d'un casino ; le Kursaal, considéré comme une annexe de la source Lithium, ouvre ses portes deux ans plus tard.

Création d'un établissement thermal

En 1899, Pierre Jules Gagey, fils de Pierre Jean-Louis Gagey, rachète l'affaire. Il commence par acquérir le terrain où Thomas-Caraman avait implanté un premier modeste édifice. Il y construit un véritable établissement thermal, aujourd'hui entièrement disparu mais connu grâce à des cartes postales anciennes. Il s'agit d'un long bâtiment rectangulaire en pans de bois et briques vernissées. Au rez-de-chaussée, les cabines donnent directement sur la cour. À l'étage, elles s'ouvrent sur une galerie couverte dont l'élégance est rehaussée par les lambrequins débordant du toit. La source elle-même est abritée par un édicule comparable à un kiosque au plan polygonal qui forme une saillie par rapport à la façade.
La demande de création d'un périmètre de protection des eaux lui est refusée, ce qui ouvre la voie à l'exploitation de forages concurrents. On assiste dès lors à un morcellement de l'exploitation des eaux, qui est l'une des caractéristiques de la station thermale de Santenay. En 1903, la construction du Grand Hôtel des Bains attenant la source Carnot est annoncée. Gagey, craignant de ne pouvoir résister à la concurrence, vend le terrain et les bâtiments au docteur Gamulin qui réside à Charenton-le-Pont (Val-de-Marne). Contre toute attente, l'établissement thermal de la source Lithium connaît une relative et stable prospérité jusqu'à la Première Guerre mondiale, et parvient à faire face à son concurrent. Les bouteilles en particulier se vendent très bien. Le nombre des bains semble en revanche réduit ; on en dénombre une vingtaine seulement par jour autour de 1910.
La fréquentation de la source chute après la Première Guerre mondiale. Vers 1923, Gamulin vend l'ensemble à un industriel de Chéry (Cher), Jacques Étienne Concaret. L'édifice n'est pas entretenu et tombe peu à peu en ruines. Les matrices cadastrales indiquent que l'établissement des bains est désaffecté et rapidement détruit au milieu des années 1920. Le magasin, ruiné, semble subsister jusqu'au milieu des années 1930. Après la Seconde Guerre mondiale, le débit est presque nul en raison des saletés qui ont fini par obstruer le captage. Dans les articles qu'il consacre aux sources en 1950, Louis Gerriet mentionne encore l'édicule de la buvette ("pergola en fer forgé") mais précise que la vasque est "rouillée jusqu'au cœur".

Construction du kiosque de dégustation

En 1956, la commune de Santenay achète les quatre sources (Fontaine Salée, Lithium, Carnot et Santana) dans le but de relancer l'activité thermale et obtenir ainsi la réouverture du Kursaal, source non négligeable de revenus. Le service des Mines prescrit un nettoyage du tube de la source, qui est à nouveau forée jusqu'à près de 89 mètres. La source Carnot est par ailleurs reliée à la source Lithium par une conduite sous l'avenue des Sources. À l'emplacement de la cour de l'ancien établissement thermal, précisément à sept mètres au sud du forage de la source Lithium, un nouveau "kiosque de dégustation" commun aux deux sources est construit d'après les plans de l'ingénieur d'arrondissement ; les dessins d'exécution de l'édicule sont datés du 9 juin 1958, ceux de la vasque du 6 juin 1959. L'édicule en béton armé subsiste encore aujourd'hui. Le préau et le local modeste du gardien, construits à proximité, ont en revanche été détruits. De même, il ne subsiste aujourd'hui aucune trace du mur de clôture qui fermait l'ensemble. Le dernier bâtiment est celui qui abrite les W.C. de l'autre côté de l'avenue des Sources ; il subsiste encore aujourd'hui (dépendance de la maison n°28 de l'avenue des sources).
Les eaux sont placées en régie directe par la commune, sous la surveillance du gardien Foucherot qui tient le registre des curistes. La saison commence le 1er juillet et se termine le 15 septembre. Le prix de la carte de cure de trois semaines est d'abord fixé à 500 francs, avant d'être augmenté pour atteindre finalement 2 000 francs en 1964. La carte est gratuite pour les habitants de Santenay. En 1963, une centaine de cartes sont vendues, majoritairement à des curistes résidant en dehors de la Bourgogne. Le litre d'eau à emporter est vendu dix francs. Grâce à ces nouvelles installations, Santenay redevient officiellement une station thermale en 1963. Elle est classée station hydrothermale et climatique en 1968.
Dans ce contexte favorable, la création d'un nouveau centre thermal (1977-1978) fait entrer la station dans une nouvelle ère.
Période(s)
Principale :
  • 4e quart 19e siècle [détruit]
  • 3e quart 20e siècle [détruit]
Date(s)
1893 : daté par source
1899 : daté par source
1958 : daté par source
Auteur(s) & personnalité(s)

Il reprend l'exploitation de la source Lithium mise à jour par son père, Pierre Jean-Louis Gagey.

Médecin qui officie à Forges-les-Eaux en Normandie, avant de s'intéresser à la station thermale de Santenay.

Description


Il ne reste rien du magasin de 1893 et de l'établissement thermal de 1899. Le seul vestige de l'exploitation de la source Lithium réside dans le kiosque en béton armé construit en 1958-1859. L'édicule prend la forme d'une vaste dalle circulaire posée sur quatre piliers en pyramides inversées. Au milieu se trouve une vasque décorée de fragments de céramique multicolores, aujourd'hui transformée en pot à fleurs. La partie centrale de la dalle de couverture qui forme une coupole est percée d'une multitude de briques de verre rondes disposées en rayons concentriques et en cercles. Le sol de plan circulaire est orné d'une multitude de tessons polychromes. Le local des W.C. situé de l'autre côté de l'avenue des Sources est également construit en béton armé. Il est couvert d'un toit à un pan en tuile mécanique.
Murs :
  • béton
Toit :
  • béton en couverture
  • tuile mécanique
Plan :
  • plan centré
Etages :
  • rez-de-chaussée
Couvrement :
  • dalle de béton
Couvertures :
  • toit à un pan
Décors :
  • céramique

Source(s) documentaire(s)

  • Archives départementales de la Côte-d'Or. Cadastre de la commune de Santenay. [1839-1966].
    Archives départementales de la Côte-d'Or. Cadastre de la commune de Santenay. [1839-1966].- Atlas parcellaire (1839) : 3 P PLAN 582- État de section (1839) : 3 P 582/ES- Matrices cadastrales des propriétés bâties et non bâties : 3 P 582/1 (folio 1 à 760), 3 P 582/2 (folio 761 à 1114)- Matrice cadastrale des propriétés bâties : 3 P 582/3- Matrice cadastrale dite « matrice noire » des propriétés bâties : 3 P 582/4- Matrices cadastrales des propriétés non bâties : 3 P 582/5 (folio 1 à 488), 3 P 582/6, (folio 489 à 1088), 3 P 582/7 (folio 1089 à 1588), 3 P 582/8 (folio 1589 à 1669)
    Lieu de conservation : Archives départementales de la Côte-d'Or, Dijon - Cote du document : 3 P 582
  • Archives communales de Santenay. 3 N 7-14. Documents relatifs aux eaux de Santenay. [1949-1975].
    Archives communales de Santenay. 3 N 7-14. Documents relatifs aux eaux de Santenay. Acquisition des sources par la commune [1949-1956]. Règlement des sources [1960]. Carnets des cartes des curistes [1959-1975].
    Lieu de conservation : Archives municipales, Santenay - Cote du document : 3 N 7-14
  • Archives communales de Santenay. 1 O 72-78. Voirie, aménagement du parc des sources. [1957-1958].
    Archives communales de Santenay. 1 O 72-78. Voirie, aménagement du parc des sources. [1957-1958].
    Lieu de conservation : Archives municipales, Santenay - Cote du document : 1 O 72-78
  • Santenay. Les Sources. [carte postale]. [vers 1904].
    Santenay. Les Sources. [carte postale]. Chalon-sur-Saône : B.F., [vers 1904].
    Lieu de conservation : Collection particulière
  • Source Lithium. Santenay. [carte postale]. [vers 1908].
    Source Lithium. Santenay. [carte postale]. Bourg-en-Bresse : B. Ferrand, [vers 1908].
    Lieu de conservation : Collection particulière
  • Santenay. Source Lithium. [carte postale]. [s.d.].
    Santenay. Source Lithium. [carte postale]. [s.l] : [s.n.], [s.d.].
    Lieu de conservation : Collection particulière
  • Commune de Santenay-les-Bains. Aménagement du parc des sources. Plan d'ensemble. 29 mai 1958.
    Commune de Santenay-les-Bains. Aménagement du parc des sources. Plan d'ensemble / [s.n.]. 29 mai 1958. Dessin. Échelle 1/200. In : Archives communales de Santenay. 1 O 72-78. Voirie, aménagement du parc des sources. [1957-1958].
    Lieu de conservation : Archives municipales, Santenay - Cote du document : 1 O 76
  • Commune de Santenay-les-Bains. Aménagement du parc des sources. Dessins du mur de clôture, du bureau du gardien et du préau. 29 mai 1958.
    Commune de Santenay-les-Bains. Aménagement du parc des sources. Dessins du mur de clôture, du bureau du gardien et du préau / [s.n.]. 29 mai 1958. Dessin. Échelle 1/100. In : Archives communales de Santenay. 1 O 72-78. Voirie, aménagement du parc des sources. [1957-1958].
    Lieu de conservation : Archives municipales, Santenay - Cote du document : 1 O 76
  • Commune de Santenay-les-Bains. Aménagement du parc des sources. Kiosque de dégustation. Dessin d'exécution. 9 juin 1958.
    Commune de Santenay-les-Bains. Aménagement du parc des sources. Kiosque de dégustation. Dessin d'exécution / 9 juin 1958. Dessin. Échelle 1/100, 1/20 et 1/10. In : Archives communales de Santenay. 1 O 72-78. Voirie, aménagement du parc des sources. [1957-1958].
    Lieu de conservation : Archives municipales, Santenay - Cote du document : 1 O 72-78
  • Commune de Santenay-les-Bains. Aménagement du parc de sources. Kiosque de dégustation. Détail de la vasque. 6 janvier 1959.
    Commune de Santenay-les-Bains. Aménagement du parc de sources. Kiosque de dégustation. Détail de la vasque / [s.n.]. 6 janvier 1959. Dessin. Échelle 1/10 et 1/1. In : Archives communales de Santenay. 1 O 72-78. Voirie, aménagement du parc des sources. [1957-1958].
    Lieu de conservation : Archives municipales, Santenay - Cote du document : 1 O 76
  • Santenay-les-Bains (Côte-d'Or). Les Sources. [carte postale]. [vers 1961].
    Santenay-les-Bains (Côte-d'Or). Les Sources. [carte postale]. [Mâcon] : Combier, [vers 1961].
    Lieu de conservation : Collection particulière
  • Thomas-Caraman, Charles. Coup d'œil sur la source Lithium de Santenay (Côte-d'Or). 1893.
    Thomas-Caraman, Charles. Coup d'œil sur la source Lithium de Santenay (Côte-d'Or), eau minérale chlorurée sulfatée sodique forte, chlorurée potassique et sulfocarbonatée calcique, la plus riche en chlorure de lithium. Paris : O. Doin, 1893. 64 p.
  • Gerriet, Louis. Une richesse nationale qui se perd : les eaux minérales de Santenay-les-Bains. 1950.
    Gerriet, Louis. Une richesse nationale qui se perd : les eaux minérales de Santenay-les-Bains. La Bourgogne républicaine, 26-27 août 1950, p. 6, 28 août 1950, p. 6, 29 août 1950, p. 6, 30 août 1950, p. 6.
  • Charbon, Paul. Histoire du thermalisme à Santenay. 2000.
    Charbon, Paul. Histoire du thermalisme à Santenay. Santenay : Paul Charbon, 2000. 53 p.
  • Raynal, Cécile. Un exemple d'eau minérale artificielle à reconstituer chez soi : les fameux « Lithinés du Dr Gustin ». 2007.
    Raynal, Cécile. Un exemple d'eau minérale artificielle à reconstituer chez soi : les fameux « Lithinés du Dr Gustin ». Revue d'histoire de la pharmacie, 94ᵉ année, n°356, 2007. p. 505-518.
  • Charbon, Paul. Santenay et son histoire. 2009.
    Charbon, Paul. Santenay et son histoire. Santenay : Éditions santenoises, Paul Charbon, 2009. 319 p. ISBN 978-2-7466-1193-1.

Informations complémentaires

Thématiques :
  • thermalisme en Bourgogne-Franche-Comté (le)
Aire d’étude et canton : Bourgogne-Franche-Comté
Dénomination : établissement thermal
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