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LE MOBILIER DU THÉÂTRE DE SENS

89 - Sens

1-2 boulevard des Garibaldi

  • Dossier IM89002375 réalisé en 2022 revu en 2023
  • Auteur(s) : Laurent Poupard
lustre © Région Bourgogne-Franche-Comté, Inventaire du patrimoine

Historique


Rien ne nous est parvenu du décor de la première salle de spectacle, bâtie dans la décennie 1790 pour le marchand Jean-Louis Guyot. Lorsqu'elle est achetée en 1824 par François Théodore Clément Lorne, les décors scéniques, "dans un état peu satisfaisant", sont "un palais, un salon, une ville, une chaumière, une forêt, une prison et une auberge ; le mécanisme existe en plus ou moins mauvais état". L'architecte municipal Varnout rédige en 1832 et 1833 deux projets de restauration, mentionnant notamment que les banquettes, garnies de foin ou d'étoupe, seront rhabillées de toile jaune ou bleue et que le garde-corps des premières recevra un "papier à ornement". Il prévoit aussi un lustre et des quinquets pour éclairer la scène, les couloirs et les escaliers, ainsi que le renouvellement ou la restauration des décors scéniques. Traités à part, les décors et le rideau d'avant-scène sont confiés au peintre décorateur Dumay (16 rue du Faubourg du Temple, à Paris). Ces travaux sont réalisés en 1833. Dix ans plus tard, l'architecte Jacques Athanase Tourneur coiffe la salle d'une coupole sobrement décorée : "On dessinera la voûte en parasol, dont les bords inférieurs recevront une poste à chaque compartiment et se termineront près la lunette par une grecque. Ces ornemens seront faits aussi en vermillon et laque à l'huile".
Mobilier et décor sont refaits de 1880 à 1882 suivant les indications de l'architecte Horace Lefort, à l'occasion de la construction du nouveau théâtre. La sculpture extérieure est réalisée au cours du premier semestre 1882 par Henri Marquet qui, pour les masques, suit les modèles donnés par le sculpteur Ferdinand Levillain (auteur également de celui pour la grille surmontant le grand lustre de la salle). L'aménagement intérieur fait l'objet d'un devis séparé et la commission municipale chargée de cette question en confie en 1882 la supervision à Augustin Vizentini, "ancien administrateur du théâtre de l'Opéra et des principaux théâtres de France", demeurant 27 rue du Faubourg Saint-Didier à Sens. Vizentini et Sarrazin, l'architecte de la ville, répartissent les travaux en trois lots et demandent des devis. La commission décide de confier le premier lot ("Décors scéniques - Décoration de la Salle - Machinerie") "à des spécialistes de Paris et Lyon seulement, attendu leur caractère d'oeuvre d'art toute spéciale". Elle en contacte neuf : Nezel, "machiniste et décorateur du théâtre du Châtelet" ; Robuchi, 9 rue Lauzier ; Zarra, 18 rue Labat ; Goulard, 21 rue de Belleville ; Baillet, "chef machiniste du théâtre du Château d'Eau", 90 boulevard de Belleville ; Brabant, "chef machiniste de la Gaieté" ; Colombier et Rousseau, 33 faubourg Saint-Martin ; Cornil, 6 avenue de la Tourelle ; Diosse père et fils, 5 rue d'Avignon et rue Grillet à Lyon. Outre les mentions de ses brevets et des appareils fabriqués, le papier à en-tête de la société Diosse et Fils précise ses compétences : "Entreprises générales ou partielles pour théâtres, casinos et salles de concert. Maison à Paris : atelier de peintures décoratives pour scènes, salles, foyers. Maison à Genève : atelier de peintures, sculpture et modelage. Atelier de construction scénique en bois, en fer ou mixte." Le 2 février, la commission adjuge le 1er lot à Diosse, le 2e (tapisserie) à Léon Lamy, tapissier à Sens (116 Grande Rue), et le 3e (gaz) à Edouard Stanislas Michaut-Millon, également de Sens (9 rue du Plat d'Etain). Le premier lot comprend les décors scéniques (estimés à 14 432 F), la décoration de la salle (21 645 F) et la machinerie (15 908 F). Cette dernière est achevée début juin, tandis que les décors scéniques sont en bonne voie. Ils sont au nombre de neuf : un "salon très riche" ("ce salon assez riche pour faire palais au besoin") ; un "salon bourgeois aisé et coquet" ; un "salon simple pouvant au besoin servir de Molière" ; une "chambre rustique avec les montants d'un ton sombre et les appliques d'un ton gai, afin de pouvoir la convertir en prison" ; une mansarde ; un "palais grec, très-riche pour la Tragédie" ; une "forêt pouvant se transformer en jardin" ; une "place publique - architecture" (avec fond d'église et deux maisons, "ayant chacune un balcon avec son plancher") ; un rocher (avec "fond d'horizon calme et mer"). Le 2e lot (20 000 F) est constitué pour la salle de 174 "fauteuils à bascule en bois de hêtre teint en noir et vernis, garnis avec élastique" et couverts de velours rouge, 24 "fauteuils nature" du même genre, 110 chaises aussi couvertes en velours, 48 chaises paillées, 10 bancs en bois "garnis en petit foin et recouverts en toile dite treillis" pour le parterre, "pour les secondes un banc faisant le tour de la 2ème galerie, longueur totale 150 mètres", 100 m de mains courantes recouvertes en velours, un lambrequin en velours rouge ; pour le foyer du public, 2 canapés de 6 places "genre anglais" couverts en velours grenat, 4 fauteuils et 6 chaises ; pour l'orchestre, 20 "chaises ordinaires paillées", 20 pupitres et "un fauteuil couvert en moleskine pour le chef" ; pour le foyer des acteurs, 2 banquettes couvertes en moleskine, 18 chaises ; mobilier pour la scène, rideaux, housses de protection, etc. La commande définitive sera un peu différente. Le 3e lot (11 692 F) correspond à l'éclairage au gaz, avec divers lustres dont un à 5 branches pour le foyer et un grand (2 m de diamètre pour 2,50 m de haut) "garni de cristaux et de 110 bougies" pour la salle, rampe d'avant-scène, herse, portants, lanterne, "lyre hollandaise", jeu d'orgue, compteur, etc.
Le mobilier et le décor sont partiellement rénovés dans les années 1920. En 1924, les bancs du parterre sont remplacés par 108 fauteuils à bascule ("semblables à ceux en usage dans les établissements cinématographiques") et 16 strapontins, fournis par l'Ecole professionnelle des Opérateurs cinématographiques de France, dirigée par Pierre Postollec (66 rue de Bondy, Paris). 1928 voit la rénovation complète de la décoration de la salle, par le peintre Georges Lods (17 rue Victor Guichard), avec réfection des peintures et des papiers de tenture, "retouche des peintures décoratives de la coupole, des balcons et du portique de la scène". Nouvelle rénovation en 1980-1981 suivant un projet des architectes scénographes Camille Demangeat et Michel Rioualec. Décors et peintures décoratives sont refaits à l'identique par la SA Edmond Petit (23 rue du Mail à Paris) et les sièges sont remplacés par la SA Quinette International (15-17 rue de la Nouvelle France à Montreuil). Le parterre et le premier balcon sont alors dotés de fauteuils, leurs loges de chaises, le deuxième balcon de banquettes en bois ; il est prévu d'installer 183 fauteuils fixes et 12 strapontins au parterre, 72 fauteuils fixes et 8 strapontins au 1er balcon, et de regarnir les 70 m de banquettes du 2e balcon. Le jeu d'orgues est supprimé à cette date. En 2023 ne subsiste aucun décor scénique mais l'établissement a conservé divers luminaires, notamment les deux appliques en façade.
Période(s)
Auteur(s) & personnalité(s)

Dumay. Peintre décorateur, demeurant 16 rue du Faubourg du Temple à Paris en 1833.

Date de naissance : 02/05/1801

Tourneur, Jacques Athanase (1801-?). Né à Auxerre le 12 floréal an 9 (2 mai 1801). Fils de l'architecte Jacques Tourneur. Architecte à Sens en 1844. (Source : https://www.geneanet.org/releves-collaboratifs/view/104585/811)

Date de naissance : 05/12/1843 - date de décès : 09/02/1931

Marquet, Henri (1843-1931). Entrepreneur de sculpture à Sens. A travaillé pour le service des Monuments historiques, notamment à la cathédrale.(Source : https://gw.geneanet.org/mmignot?n=marquet&oc=1&p=henri)

Date de naissance : 29/07/1837 - date de décès : 08/01/1905

Levillin, François Ferdinand (1837-1905), dit Levillain, Ferdinand. Elève de François Jouffroy à l'école des Beaux-Arts de Paris. Sculpteur, médailleur et orfèvre (il travaille notamment pour les maisons Barbedienne et Christofle). Demeure en 1892 au 31 boulevard Richard Lenoir à Paris.(Sources : https://fr.wikipedia.org/wiki/Ferdinand_Levillain et http://www2.culture.gouv.fr/LH/LH131/PG/FRDAFAN83_OL1628017v001.htm)

Société Diosse et Fils. Etablie 5 rue d'Avignon et rue Grillet à Lyon. Références et compétences (papiers à en-tête de 1882) : théâtres de Brest, Reims, Bâle, Bucarest, Lyon, Genève, Rouen ; "Entreprises générales ou partielles pour théâtres, casinos et salles de concert. Maison à Paris : atelier de peintures décoratives pour scènes, salles, foyers. Maison à Genève : atelier de peintures, sculpture et modelage. Atelier de construction scénique en bois, en fer ou mixte."

Source(s) documentaire(s)

  • Archives municipales de Sens : 4 M Théâtre. 1821-1990.
    Archives municipales de Sens : 4 M Théâtre. 1821-1990.
    Lieu de conservation : Archives municipales, Sens - Cote du document : 4 M
  • Ville de Sens, Services techniques : dossiers concernant le théâtre. 20e siècle.
    Ville de Sens, Services techniques : dossiers concernant le théâtre. 20e siècle.
    Lieu de conservation : Ville de Sens, Services techniques - Cote du document : non coté
  • Ville de Sens. Restauration du théâtre. 1844.
    Ville de Sens. Restauration du théâtre. Dessin (plume), par l'architecte Tourneur. Sens le 25 mai 1844. 19 x 30 cm, 1/100.- Plan de l'étage souterrain. Lavis.- Plan du rez de chaussée. Lavis. - Plan du parterre du théâtre actuel [et] Plan des 1ères loges idem. Lavis. Sans éch.- Plan des 1ères loges. Lavis.- Plan des 2es loges. Lavis. - Coupe longitudinale dans l'axe. Lavis. - Coupe transversale sur la salle. Lavis.- Coupe transversale sur l'avant-scène. Lavis. - Coupe transversale sur la scène. Lavis.- Elévation du théâtre actuel sur l'esplanade. - Elévation sur l'esplanade. Lavis.- Elévation du théâtre au couchant. Sans éch.- Elévation à l'ouest.
    Lieu de conservation : Archives municipales, Sens - Cote du document : 4 M
  • [Modèles de luminaires, becs et robinets à gaz, etc.]. S.d. [février 1882].
    [Modèles de luminaires, becs et robinets à gaz, etc.]. Dessin sur calque (crayon de papier), s.n. S.d. [février 1882]. Sans éch. 3 feuilles : 32,5 x 102 cm, 33 x 52,5 cm, 33 x 43 cm.
    Lieu de conservation : Archives municipales, Sens - Cote du document : 4 M
  • Ville de Sens. Aménagement intérieur du théâtre. Plan à annexer au devis des appareils à gaz. S.d. [février 1882].
    Ville de Sens. Aménagement intérieur du théâtre. Plan à annexer au devis des appareils à gaz. Dessin sur calque (crayon de papier, lavis), s.n. S.d. [février 1882]. Sans éch.- [Modèles de luminaires]. 37,5 x 40,5 cm.- [Lampes, lustre, treuil, etc.]. 37 x 139 cm.- N° 2433 au 5e d’exécution [lustre]. 36 x 31,5 cm.
    Lieu de conservation : Archives municipales, Sens - Cote du document : 4 M
  • [Projet de lustre]. S.d. [février 1882].
    [Projet de lustre]. Dessin sur calque (gouache), s.n. S.d. [février 1882]. 65 x 52 cm, sans éch.
    Lieu de conservation : Archives municipales, Sens - Cote du document : 1 Fi 276
  • Théâtre de Sens [croquis de localisation des places]. S.d. [4e quart 19e siècle ?].
    Théâtre de Sens [croquis de localisation des places]. Dessin sur calque (plume), s.n. S.d. [4e quart 19e siècle ?]. Sans éch.- Plan du rez-de-chaussée. 45 x 31,5 cm.- Premières. 43,5 x 30,5 cm.- Secondes. 45 x 31 cm.
    Lieu de conservation : Archives municipales, Sens - Cote du document : 4 M
  • Ville de Sens. Théâtre municipal. Mise en conformité. Implantation des fauteuils. PEO. 1980.
    Ville de Sens. Théâtre municipal. Mise en conformité. Implantation des fauteuils. PEO. Dessin (tirage), par le scénographe C. Demangeat. 1980. 1/20.- SC 27 A. Parterre. 9 juillet 1980. 88 x 109 cm.- SC 28. 1er balcon. 4 août 1980. 85 x 112 cm.
    Lieu de conservation : Ville de Sens, Services techniques - Cote du document : non coté
  • [Le théâtre en cours de restauration]. S.d. [1980-1981].
    [Le théâtre en cours de restauration]. Photographie, s.n. S.d. [1980-1981]. Tirages noir et blanc.
    Lieu de conservation : Archives municipales, Sens - Cote du document : 3 Fi 1428-1477
  • Dodet, E. Les origines du théâtre municipal. 30 avril 1981.
    Dodet, E. Les origines du théâtre municipal. Le Sénonais libéré, jeudi 30 avril 1981, ill.

Informations complémentaires

Thématiques :
  • salles de spectacle de Bourgogne-Franche-Comté
Aire d’étude et canton : Bourgogne-Franche-Comté
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