LES SIÈGES DU THÉÂTRE
21 - Dijon
- Situé dans : Théâtre municipal
- Emplacement : Foyer, loges
- Dossier IM21013411 réalisé en 2022
- Auteur(s) : Laurent Poupard
Historique
L'ébéniste parisien Jean-Jacques Werner fournit en 1828 pour le théâtre un ensemble de sièges (fauteuils, chaises, banquettes et tabourets). Le rapport de la commission de la salle de spectacle en date du 1er septembre 1827 évoquait la question du mobilier et notamment des sièges. Elle proposait de laisser l'ameublement des salons des loges d'avant-scène à la charge des personnes qui les occuperont, et pour celui du maire "deux fauteuils, quelques chaises et une table formeraient un mobilier suffisamment décent et proportionné à la petitesse du local". L'ameublement du foyer devait être composé uniquement de fauteuils mais elle signalait qu'il n'y avait pas "nécessité de s'écarter à Dijon des règles ordinaires adoptées dans tous les théâtres, que partout ce sont des banquettes qui garnissent le foyer et que c'est ce qui doit avoir lieu ici", en conservant tout de même quelques fauteuils qui y seraient apportés "pour les fêtes ou réunions extraordinaires". Elle proposait aussi de remplacer la banquette fixe du premier rang des loges par des chaises étant donné qu' "il y a inconvenance et en quelque sorte indécence que les dames soyent obligées pour arriver à leur place d'enjamber par-dessus la banquette et il y a dans le système des banquettes sans dossier grave incommodité puisque les dames seraient pendant 4 ou 5 heures sans aucun appui que les genoux des personnes qui seraient derrière elles". Le marché prévu avec Werner avait donc été revu. Le mémoire que ce dernier présente le 7 novembre 1828 fait notamment état de la livraison de 18 grands fauteuils (12 en maroquin et 6 en velours), 36 chaises en velours ponceau et 36 en maroquin rouge, 40 tabourets en frêne, 8 banquettes en maroquin, 135 m de banquettes en toile et treillis et 164 en moquette cramoisie, etc. (la garniture rouge des sièges qui subsistent a depuis été remplacée par une bleue). Werner se dit alors "décorateur et fabricant de meubles du Roi, de S.A. Re. Monseigneur le duc de Bordeaux et de S.A. Re. Madame duchesse de Berry" ; il est signalé à Paris au 25 rue du Bouloi mais mentionne aussi comme adresse la fabrique du 126 rue de Grenelle Saint-Germain et la "Manufacture des bois indigènes" du 25 rue de Babylone. D'autres sièges ont été acquis à diverses époques après 1828, dont subsiste notamment un ensemble de chaises en acajou blond du milieu du 19e siècle. Certains ont été protégés au titre des monuments historiques en 2013 : l'arrêté de protection liste un ensemble de douze fauteuils à dossier plat, deux bergères en gondole, deux chaises à dossier plat, seize chaises à barrettes, une chaise en gondole, deux tabourets et six bancs en frêne massif ronceux, livrés par Werner, et neuf chaises en acajou blond.
- 2e quart 19e siècle
- 3e quart 19e siècle
Date de naissance : 1791 - date de décès : 1849
Werner, Jean-Jacques (1791-1849). Ebéniste et tapissier parisien (25 rue Bouloy et 126 rue de Grenelle St-Germain). Né en Suisse, installé à Paris en 1812 et naturalisé français en 1826. Devient fournisseur du Garde-meuble de la Couronne en 1820. Se dit en 1827 "décorateur et fabricant de meubles du Roi, de S.A. Re. Monseigneur le duc de Bordeaux et de S.A. Re. Madame duchesse de Berry". Exploite lui-même ses bois, notamment le frêne.(Source : https://fr.wikipedia.org/wiki/Jean-Jacques_Werner_(%C3%A9b%C3%A9niste))
- Paris126 rue de Grenelle25 rue de Babylone
Description
Cinquante sièges rembourrés ont été retenus lors de l'étude, ce qui correspond (avec une répartition différente) au chiffre avancé par l'arrêté de protection de 2013 (il est assez ardu de dénombrer précisément ces oeuvres, faciles à déplacer et provenant de plusieurs fournisseurs et plusieurs époques). La majorité est conservée dans le foyer. Décompte : 12 fauteuils à dossier plat garni, 2 à dossier concave garni (bergères) et 1 à dossier concave en bois (loge du préfet), 13 chaises à dossier plat garni, 7 à dossier plat à barreau et 5 à dossier concave garni, 1 tabouret signé Werner et 2 tabourets "rustiques", 4 banquettes à quatre pieds (Werner) et 3 bancs à trois pieds ("rustiques" et en bois résineux). Les sièges "rustiques" ne sont certainement pas l'oeuvre de Werner.
- menuiserie ébénisterie
- tissu
- frêne, ronceux, châssis, Array
- acajou, châssis, Array
- matériau textile, garniture, Array
Fauteuil à dossier plat garni (en cm) : h = 97, l = 63, pr = 56. Fauteuil à dossier concave garni : h = 86, l = 56, pr = 57. Fauteuil à dossier concave en bois : h = 78,5, l = 55, pr = 50. Chaise à dossier plat garni : h = 89, l = 47,5, pr = 46. Chaise à dossier plat à barreau : h = 84, l = 44,5, pr = 41. Chaise à dossier concave garni : h = 91,5, l = 41,5, pr = 39. Tabouret haut (Werner) : h = 62, l = 37, pr = 37. Tabouret bas : h =50, l = 32, pr = 32. Banquette à 4 pieds : h = 47, l = 169, pr = 41. Banc à 3 pieds : h = 49,5, l = 192, pr = 24,5.
Inscription gravée sous l'assise d'un tabouret : J.J.WERNER.- inscription concernant l'auteur, gravé, sur l'oeuvre
Source(s) documentaire(s)
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Archives municipales de Dijon : 4 M 7/2-15. Salles de spectacle. 1794-1878.
Archives municipales de Dijon : 4 M 7/2-15. Salles de spectacle. 1794-1878.Lieu de conservation : Archives municipales, Dijon - Cote du document : 4 M 7/2-15 -
Papier à en-tête de J.-J. Werner, 1828.
Papier à en-tête de J.-J. Werner, 1828.Lieu de conservation : Archives municipales, Dijon - Cote du document : 4 M 7/9 -
Foyer du nouveau théâtre. 19 novembre 1828.
Foyer du nouveau théâtre. Journal de Dijon et de la Côte-d’Or, 17e année, n° 91, mercredi 19 novembre 1828, p. 361-362.
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Clert, Anne-Bénédicte ; François, Bruno ; Rivière, Adeline ; Vottero, Michaël. Regard sur les ensembles mobiliers civils bourguignons. 2016.
Clert, Anne-Bénédicte ; François, Bruno ; Rivière, Adeline ; Vottero, Michaël. Regard sur les ensembles mobiliers civils bourguignons. In Situ [en ligne], n° 29, 2016 [consultation du 12 août 2022]. Accès internet : http://journals.openedition.org/insitu/13548
À voir
Informations complémentaires
Foyer du nouveau théâtre. Journal de Dijon et de la Côte-d’Or, 17e année, n° 91, mercredi 19 novembre 1828, p. 361-362.
Jusques à présent nous avons gardé le silence sur l’une des beautés accessoires qu'offre notre nouveau Théâtre, le Foyer. Cette pièce qui règne, au premier, sur toute la largeur du péristile, est conçue dans de belles proportions ; elle présente, et par son architecture, et par les sculptures d'un fini précieux qui la décorent, un ensemble du plus bel effet ; et s'il n'existe dans aucun des théâtres de la capitale un foyer qui l'emporte sur celui-ci, nous ne pensons pas qu'on puisse en trouver un dans les plus grandes villes de province qui puisse lui être comparé.
Mais combien l’art du tapissier appelé à mettre la dernière main à la décoration de ce Foyer, susceptible de plus d'une destination, et à son ameublement, n'a-t-il pas ajouté à sa magnificence !
Nous ne saurions en donner une juste idée, si nous n’offrions une espèce d'inventaire de tout ce qui constitue ces accessoires obligés.
Les deux cheminées construites aux extrémités, en regard l'une de l'autre; sont ornées chacune d'une glace de 10 pieds de hauteur sur 6 de largeur, encadrée dans une bordure de 4 pouces de largeur, formant gorge, à guirlande de laurier.
Les feux en bronze doré et vert antique, et d'une grande dimension, sont richement ornés de feuilles d'acanthe ; ils sont assortis de pelles, pincettes, soufflets et balais de formes élégantes.
Les huit portes figurées aux extrémités, sont ornées de 64 glaces de la dimension des carreaux des croisées.
Ces portes et celles d'entrée, ainsi que les croisées, le tout au nombre de 18, sont décorées de 36 rideaux en mousseline façon de bazin, agrémentés de galons rouges. 18 archivoltes du même tissu, disposées chacune en 4 compartimens par un cable rouge avec rosaces en cuivre doré, forment le complément des draperies. La simplicité de cette décoration nous a paru faire ressortir l'architecture d'une manière tort habile et digne de fixer l'attention des amateurs.
Trois lustres en bronze, dorures et cristaux, garnis chacun de 48 bobèches, et d'un modèle neuf très-gracieux, forment un des beaux ornemens de la pièce, et leurs lumières répétées par les glaces produisent un effet que l'œil ne peut se lasser d'admirer.
L'ameublement est composé de 12 fauteuils et 12 chaises, qu'en terme de l'art on appelle meublans ; 24 chaises à fond garni et 8 banquettes, chacune à 4 places. Les bois de ces meubles sont en fresne massif ronceux, et non en racines d’ormes comme on l'a prétendu. Tout l'ameublement est couvert en maroquin rouge agrémenté de galons d'or.
C'est M. J. J. Werner, décorateur et fabricant de meubles du Roi, rue du Bouloy, n° 25, à Paris, à qui la confection de toutes les pièces que nous venons de décrire a été confiée, et nous pouvons dire, sans craindre la plus légère contradiction, que ce fabricant, par l’intelligence et 1e goût qu'il a développés dans cette circonstance, s'est montré, en véritable artiste, et qu'il a dignement répondu à la confiance que l'administration avait mise dans ses talens. Par l’effet de son art, notre Foyer déjà si beau par lui-même, est devenu un lieu d'un aspect enchanteur lorsque les mille bougies qui y frappent l'œil, en rehaussent l'éclat. Tout y est parfaitement en harmonie. Il n'y a là-dessus qu’une voix.
Ce qu'on ne saurait trop louer dans M. Werner c'est l’emploi qu'il fait des bois indigènes, l’heureux choix qu'il sait en faire, le parti qu'il a l'art d'en tirer. Nous avons admiré le fresne qu'il a employé à la confection des fauteuils, chaises et banquettes. Ce bois est très-beau et produit un effet aussi agréable à l'œil que la plupart des bois exotiques les plus précieux. Honneur à M. Werner et à tous ceux qui, marchant sur ses traces, finiront par nous affranchir du tribut que nous payons à l'étranger pour des bois qui trouvent chez nous de dignes rivaux.
Nous ne sommes point étonné, d'après ce que nous avons aujourd'hui sous les yeux, du succès que M. Werner a obtenu, en 1827, à l’exposition des produits de l'industrie française, et qu'une voie royale a daigné proclamer elle-même. Voici comment s’expliquent là-dessus les journaux de l'époque (1) : « Sa Majesté s'est arrêtée devant l'exposition de M. Werner, dont tous les meubles sont fabriqués avec des bois indigène et garnis avec des marbres de France ; elle a daigné accepter plusieurs meubles en fresne commandés en 1819 dans le but de constater la bonne conservation de cette espèce de bois français. S. M., en se retirant, a dit à M. Werner : Je suis très-content de vous voir ; vous pouvez être assuré que je saisirai toutes les occasions de vous être utile. » Quelle émulation n’ont-elles pas dû faire éclore dans l'âme de M. Werner, le germe que ces paroles d'un bon Roi y ont versé !
Nous reviendrons sur cet ingénieux décorateur lorsque nous parlerons de l'ameublement du théâtre ; mais nous ne voulons pas terminer cet article, quoiqu'il nous ait déjà mené plus loin que nous ne pensions, sans apprendre encore à nos lecteurs, que c'est M. Werner qui a été chargé de l'ameublement de la cour royale de Dijon et qu'il a rempli cet objet à la satisfaction, el de la haute administration, et de la haute magistrature.
(1) Moniteur et Gazette de France, du 19 août 1827.
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