FERME ET ATELIER D'HORLOGERIE PUIS USINE D'HORLOGERIE (USINE D'ÉBAUCHES DE MONTRE ET DE FOURNITURES POUR L’HORLOGERIE) ASTER FRÉSARD
25 - Charquemont
2 et 6 rue des Lilas
- Dossier IA25001179 réalisé en 2013 revu en 2014
- Auteur(s) : Laurent Poupard
Historique
Aster Frésard (20 mars 1848-20 mai 1912) construit à Charquemont une petite usine d'assortiments à cylindre (échappements), vers 1903 selon le cadastre, 1897 suivant la bibliographie.
Aster (François Joseph Aster) est le fils de Clément Frésard (Indevillers 1809-1884 ?) et d'Éléonore-Hortense Tanguelle (Charquemont 1810-?), paysans et faiseurs de verge (arbre portant les palettes dans un échappement à roue de rencontre). Clément est dit horloger à Montbéliard lorsqu'il dépose un brevet d'invention, délivré le 25 mars 1867, pour une "machine à craner les pignons de montres" (cranter ?).
Fixé à Bure (Suisse), Aster y a épousé Catherine Crelier qui lui a donné cinq enfants : Constant (1878-?), Victorin (1880-1936), Constance (1881 ou 1882-1961), Léon (1884-?) et Joseph (1886-1970). Il est paysan et horloger : travaillant à domicile pour un patron de Porrentruy, il fait le cylindre sur jauge, c'est-à-dire qu'il ajuste le cylindre en fonction de l'ébauche et de la hauteur de la roue, et tourne les pivots avec un burin à main. La faillite de son patron l'amène à revenir à Charquemont.
Il s'installe au 9 Grande Rue dans une ferme attestée sur le plan cadastral napoléonien de 1811 (E 15) et qui appartient alors, avec le jardin et le pré qui la jouxtent (E 16 et 17), à Claude Nicolas Joseph Ponceot (ou Ponçot). Elle est ensuite passée à Victor Aimable Guigon (qui a épousé en 1820 Marie Florentine Joséphine de Roth dite Ponceot), également signalé aux Ecorces (ferme aux 17 et 17 bis Grande Rue). Ce dernier l'a agrandie vers le nord-est en 1829 (date portée, avec les initiales VG, sur une fenêtre de cette aile) puis une nouvelle construction est mentionnée en 1855 (reprise de la partie occidentale avec aménagement de logements et d'un atelier ?). Certains des treize enfants de Guigon sont horlogers : au village Sidoine (au 18 Grande Rue), Justin et Arsène (aux 3 et 3 bis rue du Général Leclerc), aux Ecorces Edouard. La matrice cadastrale signale que trois d'entre eux (Joseph, Justin - marié à Rose Clément - et Félicien) sont propriétaires vers 1865 du bâtiment, lequel passe à Constant Clément vers 1870, au menuisier Auguste Parent vers 1892 puis à Aster vers 1903. Ce dernier ajoute à l'arrière de la ferme son usine, que le cadastre mentionne agrandie vers 1913 : ajout du corps d'entrée ? Surélévation ?
En 1895-1896, le village a été électrifié par la société suisse des Forces électriques de la Goule. Aster Frésard profite de la nouvelle énergie pour mécaniser la production et réalise chaque année, avec des machines fabriquées aux Gras et à Maîche (chez Adelin Berçot), quelques centaines de grosses d'ébauches (une grosse vaut douze douzaines d'unités). Une publicité de 1906 précise qu'outre les "assortiments cylindres pivotés sur jauge de 11 à 25 lignes, hauteurs prises au 100e m/m", il fait des échappements à ancre et à cylindre. Son affaire reste familiale : des 36 personnes (dont 15 femmes) réunies sur une photographie en 1908, le tiers fait partie de la famille (notamment les 9 jeunes enfants).
En 1911, Aster se retire et ses enfants créent la société Frésard Frères et Bessot, associant Constant (qui achètera par la suite le moulin de la Doue, commune d'Abbévillers), Victorin et Joseph Frésard à Paul Bessot (1873-1964), le mari de Constance (Léon choisit de tenir l'hôtel du Lion d'Or). La nouvelle société (une Sarl au capital d'un million de francs) se développe et compte 90 ouvriers en 1930 (60 en atelier et une trentaine à domicile, travaillant pour plusieurs patrons), avec une production mensuelle maximale d'environ 1 500 grosses d'assortiments à cylindre.
Dans les années 1930, ses dirigeants décident de se séparer pour fonder chacun sa propre société : Victorin dès 1932 (Victorin Frésard et Enfants, rue du Château), Constant (Constant Frésard et Cie, sur place), Joseph (Frésard-Vadam puis Frésard-Panneton, rue Cuvier où il a son habitation au n° 4) et Paul Bessot (Bessot-Frésard, dans l'usine Guillaume au 15 Grande Rue) en 1937. Associé à son gendre Alexandre Brulard, Constant poursuit la fabrication de l'assortiment à cylindre dans l'usine.
Celle-ci passe en 1940 à Louis Prétot, établi dans l'ancien bâtiment Wasner-Ruffier du 7 Rue Neuve, qui sera maire en 1947. Prétot y installe sa fabrique de pierres d'horlogerie, transférée par la suite dans l'usine qu'il fait édifier en 1951 au 18 rue de Besançon (Rubis-Précis).
L'étage abrite ensuite l'atelier de Michel Herbelin, fabricant de montres (sous la marque Impec) qui s'est mis à son compte en 1947 et a été associé jusqu'à la mi 1950 avec Léon Chatelain au sein de la Sarl des Ets Chatelain-Herbelin (au capital de 400 000 F), située au 1 rue de la Gare. Son papier à en-tête précise qu'il est aussi "régleur de précision, membre de la Société chronométrique de France". Spécialisé dans les montres à "trotteuse centrale directe 17 rubis anti-choc, boîtes extra-plates 5 1/4 anti-choc anti-poussières", il achète 4 400 ébauches françaises en 1952. Cinq ou six ans plus tard, il déplace son atelier dans la maison qu'il se construit au 13 rue des Villas en 1956-1957.
Le rez-de-chaussée est occupé à partir de 1948 par la fabrique de montres ancre et cylindre de Joseph Déchaux, auparavant abritée dans sa maison du 1 rue des Villas. La Sarl des Ets Déchaux et Cie (au capital de 10 000 F puis de 83 300 F dans les années 1960-1970) est fondée le 16 avril 1948 et compte un client principal, la société parisienne Kody, née en 1922. Elle se développe et son effectif progresse de trois personnes rue des Villas à une trentaine rue des Lilas (en comptant les travailleurs à domicile). Cette affaire est la seule du Haut-Doubs à présenter des montres lors des différents concours chronométriques organisés par l'Observatoire de Besançon. Elle obtient des prix, notamment deux médailles d'or et une d'argent en 1964 au concours chronométrique international d'Evian, et doit ces récompenses à son chef d'atelier, un régleur émérite, Gérard Boillon, embauché en 1954 pour s'occuper de la qualité de la production. Boillon en devient le gérant jusqu'en 2000, date de sa disparition lorsque Jocelyne Déchaux, la fille de Joseph, prend sa retraite. Depuis, le bâtiment est désaffecté.
De son côté, la ferme accueille, à l'étage en surcroît de la façade occidentale, la fabrique de montres d'Abel et Ernest Monnin qui sera transférée au 12 place de l'Hôtel de Ville puis au 11 rue de l'Église, puis celle de Léon-Georges Petit, qui s'établira par la suite au 9 rue Victor Hugo. Sa façade côté Grande Rue a été modifiée par l'aménagement d'une boutique (en position centrale) et la construction d'un escalier extérieur destiné à desservir un appartement installé à l'étage carré. Elle ne sert maintenant que d'habitation.
Description
Les bâtiments ont des murs en moellons calcaires enduits (celui en appentis contre l'aile nord-est de la ferme est en parpaings de béton) et sont coiffés de toits à longs pans et pignons couverts, à couverture de tuiles mécaniques. L'usine a un sous-sol, un étage carré et un comble à surcroît desservis par un escalier dans-oeuvre. Elle a un plan en L et l'entrée se trouve à son extrémité sud, dans le corps en retour (dont la toiture de tuiles en écaille est à croupe ronde côté ouest et croupe droite à l'est). Elle est largement éclairée par des rangées superposées de fenêtres multiples. La ferme se compose d'un corps principal poursuivi par une aile au nord-est et agrandi d'une deuxième aile en retour à l'ouest. Elle a un étage carré (accessible par un escalier intérieur complété par la suite par un escalier extérieur droit en béton), un étage en surcroît et un comble. On peut accéder par une levée de grange au fenil, qui se trouve au centre de l'étage en surcroît. La toiture est largement débordante au sud (côté Grande Rue). La façade principale, à l'est, est percée de fenêtres à linteau délardé en arc segmentaire (dont quatre jumelées) ; elle est encadrée par deux coches (murs pare-vent) et sa partie haute est occupée par une lambrichure chantournée. La façade sur la rue des Lilas est ouverte de baies plus récentes, dont une paire de fenêtres horlogères. Eclairée par des fenêtres d'atelier, l'extension à l'ouest (ancien atelier) a un sous-sol et un rez-de-chaussée surélevé.
- calcaire
- béton
- moellon
- parpaing de béton
- enduit
- enduit
- tuile mécanique
- tuile en écaille
- plan régulier en L
- sous-sol
- 1 étage carré
- comble à surcroît
- élévation à travées
- escalier dans-oeuvre,
- escalier de distribution extérieur, escalier droit, en maçonnerie
- baie multiple
- baie horlogère
- baie d'atelier
- énergie électrique achetée
Source(s) documentaire(s)
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3 P 128 Cadastre de la commune de Charquemont, 1812-1963
3 P 128 Cadastre de la commune de Charquemont, 1812-1963
- 3 P 128/1 : Registre des états de sections (1812)
- 3 P 128/2-3 : Matrices cadastrales des propriétés bâties et non bâties [1823-1906]
- 3 P 128/5 : Matrice cadastrale des propriétés bâties (1882-1910)
- 3 P 128/8-9 : Matrice cadastrale des propriétés bâties (1911-1963)Lieu de conservation : Archives départementales du Doubs, Besançon - Cote du document : 3 P 128 -
50 J 29 Syndicat de fabricants d'horlogerie de Besançon. Correspondance avec les fabricants, 1947-1971
50 J 29 Syndicat de fabricants d'horlogerie de Besançon. Correspondance avec les fabricants, 1947-1971Lieu de conservation : Archives départementales du Doubs, Besançon - Cote du document : 50 J 29 -
Papier à en-tête de la société Frésard Frères et Bessot, 12 octobre 1927
Papier à en-tête de la société Frésard Frères et Bessot, 12 octobre 1927Lieu de conservation : Collection particulière : Jean-Marie Bessot, Maîche -
Facture à en-tête de la société Frésard Frères et Bessot, 16 février 1937
Facture à en-tête de la société Frésard Frères et Bessot, 16 février 1937Lieu de conservation : Musée de l’Horlogerie, Morteau
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3 P 681 Plan cadastral parcellaire de la commune de Charquemont, 1811
3 P 681 Plan cadastral parcellaire de la commune de Charquemont [...] terminé sur le terrain le 24 juin 1811 [...] par M Vial géomètre du cadastreLieu de conservation : Archives départementales du Doubs, Besançon - Cote du document : 3 P 681 -
Acquisitions, aliénations, échange d'immeubles communaux [terrain au 8 Rue Neuve à aliéner à Ernest Curtit], 27 mai 1901
Acquisitions, aliénations, échange d'immeubles communaux [terrain au 8 Rue Neuve à aliéner à Ernest Curtit], dessin sur calque (plume, lavis), par le géomètre Bourquin, Maîche le 27 mai 1901, 36,5 x 45 cm, échelle 1/1000Lieu de conservation : Mairie, Charquemont -
Charquemont (Doubs) [la ferme d'Aster Frésard], 1ère moitié 20e siècle
Charquemont (Doubs) [la ferme d'Aster Frésard], carte postale, s.n., s.d. [1ère moitié 20e siècle], F. Joly libraire éd. à Charquemont, Ets C. Lardier (CLB) impr. à BesançonLieu de conservation : Collection particulière : Henri Ethalon, Les Ecorces -
Personnel de la maison Aster Frésard en 1908
Personnel de la maison Aster Frésard en 1908, photographie, s.n. Publiée dans : Belmont, Henry-Louis. L'échappement à cylindre (1720-1950) : le Haut-Doubs, centre mondial au 19e siècle. - Besançon : Technicmédia, 1984, p. 258. -
Charquemont (Doubs) [l'usine Frésard Frères et Bessot], entre 1911 et 1927
Charquemont (Doubs) [l'usine Frésard Frères et Bessot], carte postale, s.n., s.d. [entre 1911 et 1927], F. Joly éd., Ets C. Lardier phot. ou impr. à Besançon. Porte la date 7 octobre 1927 au verso. Publiée dans : Vuillet, Bernard. Entre Doubs et Dessoubre. Tome III. Autour de Charquemont et Damprichard, d'après la collection de cartes postales de Georges Caille. - Les Gras : B. Vuillet, Villers-le-Lac : G. Caille, 1991, p. 131.
Egalement collection Henri Ethalon, Les Ecorces (20152502002NUC4A)
Lieu de conservation : Collection particulière : Jean-Marie Bessot, Maîche -
Charquemont (Doubs). 11059 - Vue aérienne [depuis l'ouest], entre 1950 et 1955
Charquemont (Doubs). 11059 - Vue aérienne [depuis l'ouest], carte postale, s.n., s.d. [entre 1950 et 1955], Éditions aériennes Cim, Combier impr. à MaconLieu de conservation : Collection particulière : Jacques Donzé, Charquemont
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Belmont, Henry-Louis. L'échappement à cylindre (1720-1950) : le Haut-Doubs, centre mondial au XIXe siècle, 1984
Belmont, Henry-Louis. L'échappement à cylindre (1720-1950) : le Haut-Doubs, centre mondial au 19e siècle. - Besançon : Technicmédia, 1984. 328 p. : ill. ; 28 cm. -
Binétruy, René. Historique de deux entreprises horlogères qui ont marqué le Haut-Doubs - Neuchâtel - le Jura et Berne : HP - ISA, 8 juillet 2008
Binétruy, René. Historique de deux entreprises horlogères qui ont marqué le Haut-Doubs - Neuchâtel - le Jura et Berne : HP - ISA. - 8 juillet 2008. 28 p. ; 30 cm. -
Monnet, Bruno ; Sichler, Guy. Charquemont, Fournet-Blancheroche, 1770-1890, 2012
Monnet, Bruno ; Sichler, Guy. Charquemont, Fournet-Blancheroche, 1770-1890. - [S.l.] : Association Pages d'histoire, 2012. 435 p. : ill. ; 30 cm. -
Simonin, Michel. L'horlogerie au fil du temps et son évolution en Franche-Montagne, sur le plateau de Maîche, 2007
Simonin, Michel. L'horlogerie au fil du temps et son évolution en Franche-Montagne, sur le plateau de Maîche. - Maîche : M. Simonin, 2007. 143 p. : ill. ; 30 cm. -
Sornay, Lionel. Prosopographie des entreprises horlogères et de leurs financeurs sur le plateau de Maîche 1925-1973, 2003
Sornay, Lionel. Prosopographie des entreprises horlogères et de leurs financeurs sur le plateau de Maîche 1925-1973. - Besançon : Université de Franche-Comté, 2003. 56 p. : ill. ; 30 cm. Mém DEA : histoire industrielle : Besançon : 2003 ; 51. -
Vieux, Anne-Marie. Les dépôts de brevets comtois en horlogerie : 1791-1902, 1992
Vieux, Anne-Marie. Les dépôts de brevets comtois en horlogerie : 1791-1902. - Besançon, 1992. 120 f. ; 30 cm. Mém. Maîtrise : Histoire contemporaine : Besançon : 1992 ; 07 -
Vuillet, Bernard. Entre Doubs et Dessoubre. Tome III. Autour de Charquemont et Damprichard, 1991
Vuillet, Bernard. Entre Doubs et Dessoubre. Tome III. Autour de Charquemont et Damprichard, d'après la collection de cartes postales de Georges Caille. - Les Gras : B. Vuillet, Villers-le-Lac : G. Caille, 1991. 243 p. : cartes postales ; 31 cm.
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Boillon Gérard (témoignage oral)
Boillon Gérard, ancien gérant de la Sarl des Ets Déchaux et Cie. Maîche -
Donzé Jacques (témoignage oral)
Donzé Jacques, ancien horloger, historien de Charquemont -
Viennet Jean-Pierre (témoignage oral)
Viennet Jean-Pierre, ancien horloger, fondateur de l'association HorloPassion
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