ASILE DÉPARTEMENTAL D'ALIÉNÉS, ACTUELLEMENT CENTRE HOSPITALIER SPÉCIALISÉ DE LA CHARTREUSE
21 - Dijon
1 boulevard Chanoine Kir
- Dossier IA21000882 réalisé en 2005 revu en 2006
- Auteur(s) : Claudine Hugonnet-Berger
Historique
L'asile d'aliénés de la Côte-d'Or, un des sept premiers asiles édifiés en France après la loi du 30 juin 1838, fut construit en 1838-1844, à l'emplacement de la chartreuse de Champmol, fondée en 1385 par le duc de Bourgogne Philippe le Hardi. De ce couvent, détruit en 1792 et 1839, il ne subsiste essentiellement que le portail de l'église, l'escalier en vis de l'oratoire ducal, deux puits (dont le célèbre puits de Moïse), l'hôtellerie (bâtie en 1772) et deux portails (15e et 18e siècle). Le projet de construction d'un asile d'aliénés pour la Côte-d'Or était à l'étude depuis 1820 car l'hôpital de Maréville (Moselle), qui accueillait les aliénés de plusieurs départements de l'Est, devenait insuffisant. Aucun projet n'ayant abouti, le Conseil général acheta, en 1833, le terrain de l'ancienne chartreuse afin d'y édifier un asile. L'architecte du Département, Pierre-Paul Petit, fut chargé d'établir un projet : après avoir enquêté, il fut convaincu du bien-fondé des théories de Pinel et Esquirol, déjà mises en oeuvre par l'inspecteur général Hubert Rohault dans le projet d'asile qu'il avait conçu pour le site de l'hôpital d'Alise-Sainte-Reine. La loi sur les aliénés du 30 juin 1838 mit fin aux hésitations du Conseil général. Daté du 27 octobre 1838, le projet présenté par P.-P. Petit conciliait les directives ministérielles avec les spécificités du site, c'est-à-dire les dénivellations du terrain et l'obligation qui lui avait été faite de préserver les principaux vestiges de la chartreuse. Le 17 juin 1839, après avoir demandé quelques modifications, le Conseil des Bâtiments civils approuva le projet "avec de grands éloges". Pour des raisons budgétaires, on renonça à bâtir la morgue, l'amphithéâtre et le bâtiment de l'administration dont une partie seulement fut construite (corps de bâtiment à arcades au sud de la chapelle). L'administration fut finalement logée dans l'ancienne hôtellerie de la chartreuse. L'adjudication eut lieu le 19 décembre 1839, au profit de l'entrepreneur beaunois Chabaux-Cornu. Le plan adopté, en U, reprend approximativement le tracé du grand cloître des chartreux (axe nord-sud qui passe par le puits de Moïse situé au centre) et se singularise par l'emplacement inhabituel de la chapelle, qui n'est pas centrale mais latérale : ce choix fut motivé par la nécessité de remployer le portail de l'ancienne église. L'asile était conçu pour 200 à 220 aliénés, classés en cinq catégories (furieux, malpropres, tranquilles, convalescents et malades) et répartis dans dix quartiers en raison de la nécessaire séparation des sexes (les hommes à l'est, les femmes à l'ouest). Les ailes, très longues et comprenant trois niveaux, étaient divisées en trois quartiers (convalescents, tranquilles, malades) ayant chacun leur cour, mais sans promenoir : le deuxième niveau abritait les réfectoires et des salles de réunion, le troisième étant occupé par les dortoirs. Les furieux et les malpropres occupaient des pavillons en rez-de-chaussée (avec cour indépendante et promenoir), alignés au nord sur un terre-plein, à hauteur du troisième niveau des ailes. Un corps de bâtiment axial, au nord du puits de Moïse, abritait les principaux services : cuisine, dépendances, poste des surveillants. Trois galeries fermées de grilles permettaient au personnel de circuler à l'abri, tout en clôturant les cours des quartiers : seules les cours des tranquilles n'étaient pas fermées au sud (côté parc), mais simplement sécurisées par un saut-de-loup. La galerie desservant les quartiers nord était bâtie sur un couloir (couvert de voûtes d'arêtes) qui rattrapait la dénivellation et la dissimulait. L'architecte avait pris en compte le rôle apaisant de la végétation (grilles laissant la vue sur le parc) et de l'eau (puits, fontaines). Pour que le puits de Moïse reste accessible aux visiteurs, il fut isolé dans un enclos. Le parti très austère des bâtiments asilaires contraste avec le style néo-gothique de la chapelle. Les travaux n'étaient pas achevés quand l'asile accueillit ses premiers malades en janvier 1843. Après la démission de P.-P. Petit, le 27 janvier 1846, son successeur, Charles Suisse, construisit avec un grand souci de continuité et d'unité, au sud de chacune des deux ailes, un corps de bâtiment perpendiculaire destiné aux pensionnaires (1846-47) : un mur de clôture, de part et d'autre d'une porte flanquée de deux pavillons, fut alors construit entre ces deux nouveaux corps de bâtiment. En 1850, après la construction de divers bâtiments, notamment des bains et une buanderie, l'asile, tel que l'avait conçu P.-P. Petit, était achevé. Mais, très rapidement, le nombre de malades augmenta considérablement, nécessitant la construction de pavillons (isolés à l'est) : pensionnat de femmes (1867-1872) et d'hommes (1869-1875), quartier des idiots et des gâteux (1874-1875). En 1939 fut bâti un centre de neuropsychiatrie militaire. L'asile fut relativement préservé jusqu'aux années 1950 : dès lors, destructions et remaniements l'ont dénaturé (démolition des deux galeries qui reliaient les ailes, transformation de la galerie nord, remaniement du bâtiment des services, cloisonnement des dortoirs). L'établissement s'est considérablement développé à l'ouest.
- 2e quart 19e siècle
- 3e quart 19e siècle
Description
Les ailes comptent trois niveaux, le niveau supérieur étant un étage-attique ; en raison de la dénivellation du terrain, les deux premiers niveaux de l'aile droite sont un étage de soubassement et un rez-de-chaussée surélevé. Le corps de bâtiment destiné aux salles de service est constitué d'un sous-sol et de deux étages carrés desservis par un escalier tournant à deux volées droites. Les étages des corps de bâtiments réservés aux pensionnaires disposent d'un accès par l'extérieur (escalier droit en maçonnerie, contre le mur nord). Le premier niveau des ailes est couvert de voûtes d'arêtes. A l'exception des deux pavillons qui flanquent la porte sud, bâtis en moellons enduits, les bâtiments sont édifiés en moellons équarris avec joints rubannés. Le toit de ces deux pavillons est couvert d'ardoise.
- calcaire
- moellon
- enduit
- tuile mécanique
- ardoise
- plan symétrique en U
- sous-sol
- étage de soubassement
- rez-de-chaussée surélevé
- en rez-de-chaussée
- 2 étages carrés
- voûte d'arêtes
- élévation à travées
- escalier dans-oeuvre, escalier tournant à retours, en maçonnerie
- escalier hors-oeuvre, escalier droit, en maçonnerie
À voir
Informations complémentaires
portail, puits de Moïse : classement par liste de 1840. Puits de Jacob : classement par arrêté du 29 janvier 1902. Bâtiments hospitaliers, vestiges et sol du cloître, à l'exception des parties classées : inscription par arrêté du 4 mars 1994. Sols correspondant à l'emprise de la totalité des bâtiments composant la chartreuse à la fin du 18e siècle, vestiges de l'ancienne église, pile de la petite porte de clôture et tourelle d'escalier, édicule protégeant le puits de Moïse, chapelle néo-gothique : classement par arrêté du 15 février 1996.
- patrimoine hospitalier
- © Région Bourgogne-Franche-Comté, Inventaire du patrimoine