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STATUES D'AUTEL : LA VIERGE À L'ENFANT, SAINT JEAN-BAPTISTE ET SAINT JEAN L’ÉVANGÉLISTE

21 - Rouvres-en-Plaine

1 rue de l' Église

  • Dossier IM21013376 réalisé en 2020
  • Auteur(s) : Fabien Dufoulon
statue © Région Bourgogne-Franche-Comté, Inventaire du patrimoine

Présentation


Lors du Congrès archéologique de France (1928), Paul Vitry attire l'attention sur les trois statues. Il repousse la datation jusqu'au temps d'Antoine Le Moiturier (vers 1475) en s'appuyant sur des critères iconographiques (port de l'Enfant sur le bras droit de la Vierge) et stylistiques (lourdeur des plis et complexité du drapé, mais aussi douceur et charme des visages qu'il oppose au "style sévère et grandiose" de Claus Sluter). Il revient à Henri David (1935) de mettre en relation l'acte de fondation de messes et le récit de l'altercation entre Philippe Mâchefoing et Jehan de Drogues, qui, bien que connu par Paul Vitry, n'avait pas été rapproché des statues de Rouvres. L'attribution à Jean de La Huerta et la datation autour de 1448 ont ensuite été reprises par Marcel Aubert (1946), René Jullian (1965), Theodor Müller (1966) et plus récemment Jacques Baudouin (1996). La statue de la Vierge à l'Enfant est présentée dans les expositions consacrées à la sculpture bourguignonne du 14e au 16e siècle (1949) et au sculpteur Jean de La Huerta (1972) organisées par Pierre Quarré au Musée des Beaux-Arts de Dijon.

Historique


Les trois statues sont encore à leur emplacement d'origine, au-dessus de l'autel de la Vierge dans la chapelle ouvrant sur le bras nord du transept de l'église. Il s'agit précisément de la chapelle de la famille Mâchefoing. Les armoiries de la famille ("d'azur à trois molettes d'or au croissant de même en abîme") figurent sur l'écu de la console sur laquelle repose la statue de la Vierge à l'Enfant. Le groupe peut être rapproché d'un acte de fondation de messes dans la chapelle par Philippe Mâchefoing, châtelain de Rouvres et vicomte-maïeur de Dijon, daté du 14 mai 1448. Dans ce texte (voir annexes), le curé de l'église et ses successeurs sont "tenus de prier Dieu, la très glorieuse Vierge Marie, sa mère, monseigneur saint Jehan Baptiste, monseigneur saint Jean l’Évangéliste et tous les autres glorieux saints et saintes". La référence à la Vierge, saint Jean-Baptiste et saint Jean l’Évangéliste correspond bien en effet à l'iconographie des trois statues aujourd'hui en place dans la chapelle. Le même texte précise que les messes doivent être célébrées "en ladite église paroissiale dudit Rouvre à l'autel de la chapelle Nostre-Dame qu'il a fait faire de nouvel" ce qui permet de dater les travaux de l'autel autour de 1448. Il est enfin probable que les statues soient à l'origine de l'altercation entre Philippe Mâchefoing et Jehan de Drogues (Jean de La Huerta) survenue le 9 décembre 1448. Dans le récit de celle-ci (voir annexes), l'un des témoins rapporte que le sculpteur n'a pas achevé un "ouvraige" commandé par Philippe Mâchefoing. Ce dernier a versé un acompte de 12 francs, mais le sculpteur réclame le paiement de l'ensemble du travail, soit 24 francs.
Période(s)
Principale :
  • 2e quart 15e siècle
Date(s)
1448 : daté par source
Auteur(s) & personnalité(s)

- date de décès : 1453

Châtelain de Rouvres-en-Plaine et "vicomte maïeur" de Dijon.

Date de naissance : 1413 - date de décès : 1462

Jean de La Huerta, dit aussi Jehan de Drogues (1413-1462). Imagier, originaire de Daroca en Aragon (Espagne). Etabli à Dijon (Côte-d'Or) avant 1443, il exécuta quelques travaux en Franche-Comté.

Description


Les trois statues sont en calcaire et mesurent environ 1m30 de hauteur. Elles reposent sur des consoles surmontant un cadre mouluré au-dessus de l'autel. L'association de trois saints rappelle celle que l'on trouvait dans les chapelles de l'église du couvent des chartreux de Champmol. On sait notamment qu'une Vierge à l'Enfant était encadrée par saint Jean-Baptiste et saint Antoine dans l'oratoire bas. Cette disposition devait également se retrouver dans la chapelle haute (dite "chapelle aux anges") où trois consoles sont posées en 1393. La différence de style entre, d'une part les statues de la Vierge et de saint Jean-Baptiste, et d'autre part celle de saint Jean l’Évangéliste, a souvent été soulignée depuis Paul Vitry. Pierre Quarré a montré que les deux premières sont directement inspirées des modèles de Champmol, et il n'a pas exclu que celle de saint Jean l’Évangéliste puisse ne pas être l’œuvre de Jean de La Huerta mais celle d'un autre sculpteur qui serait intervenu après l'altercation de 1448. Cette hypothèse n'est toutefois pas suivie par Jacques Baudouin qui attribue l'ensemble des trois statues à Jean de La Huerta.
Catégories :
  • sculpture
Structures :
  • groupe non relié juxtaposé, 3
Matériaux :
  • calcaire, Array
Dimensions :

  • Dimensions : h = 130 cm.
Iconographie :

  • La statue de saint Jean-Baptiste a pu être considérée comme celle de Moïse ou d'Isaïe (en référence au Puits de Moïse de Champmol) ou de saint Antoine (en référence aux sculptures de l'oratoire de l'église de Champmol) avant l'étude de Paul Vitry (1928).
  • Vierge à l'Enfant
  • saint Jean-Baptiste
  • saint Jean l'Evangéliste
Inscriptions :

  • Écu armorié de la famille Mâchefoing ("d'azur à trois molettes d'or au croissant de même en abîme") sur la console portant la statue de la Vierge à l'Enfant.
  • armoiries, sur socle indépendant

Source(s) documentaire(s)

  • Archives départementales de la Côte-d'Or. G 4098. Clergé séculier. Paroisses, chapelles et confréries. Cure et fabrique de Rouvres-en-Plaine.
    Archives départementales de la Côte-d'Or. G 4098. Clergé séculier. Paroisses, chapelles et confréries. Cure et fabrique de Rouvres-en-Plaine.
    Lieu de conservation : Archives départementales de la Côte-d'Or, Dijon - Cote du document : G 4098
  • Archives départementales de la Côte-d'Or. B II 360/3. Cours et juridictions. Justices communales. Justice criminelle, Ville de Dijon (1442-1448).
    Archives départementales de la Côte-d'Or. B II 360/3. Cours et juridictions. Justices communales. Justice criminelle, Ville de Dijon (1442-1448).
    Lieu de conservation : Archives départementales de la Côte-d'Or, Dijon - Cote du document : B II 360/3
  • Vitry, Paul. Les sculptures de l'église de Rouvres. 1929.
    Vitry, Paul. Les sculptures de l'église de Rouvres. In : Congrès archéologique de France (91e session, 1928, Dijon). Paris : Picard, 1929. p. 441-449.
  • David, Henri. Quelques artistes méridionaux en Bourgogne. 1935.
    David, Henri. Quelques artistes méridionaux en Bourgogne. In : Annales du Midi : revue archéologique, historique et philologique de la France méridionale, tome 47, n°188, 1935. p. 329-364.
  • Aubert, Marcel. La Sculpture française du Moyen-Âge. 1946.
    Aubert, Marcel. La Sculpture française du Moyen-Âge. Paris : Flammarion, 1946.
  • Chefs-d’œuvre de la sculpture bourguignonne. 1949.
    [Exposition. Dijon, Musée des Beaux-Arts. 1949]. Chefs-d’œuvre de la sculpture bourguignonne. Dir. Pierre Quarré. Dijon : Musée de Dijon, Palais des Ducs de Bourgogne, 1949.
  • Jullian, René. La Sculpture gothique. 1965.
    Jullian, René. La Sculpture gothique. Paris : H. Laurence, 1965.
  • Müller, Theodor. Sculpture in the Netherlands, Germany, France and Spain, 1400 to 1500. 1966.
    Müller, Theodor. Sculpture in the Netherlands, Germany, France and Spain, 1400 to 1500. Baltimore : Penguin Books, 1966.
  • [Exposition. Dijon, Musée des Beaux-Arts. 1972]. Jean de La Huerta et la sculpture bourguignonne. 1972.
    [Exposition. Dijon, Musée des Beaux-Arts. 1972]. Jean de La Huerta et la sculpture bourguignonne. Dir. Pierre Quarré. Dijon : Musée de Dijon, Palais des Ducs de Bourgogne, 1972.
  • Baudoin, Jacques. La sculpture flamboyante en Bourgogne et Franche-Comté. 1996.
    Baudoin, Jacques. La sculpture flamboyante en Bourgogne et Franche-Comté. Nonette : Éditions Créer, 1996.

Informations complémentaires


Archives départementales de la Côte-d'Or. G 4098. Clergé séculier. Paroisses, chapelles et confréries. Cure et fabrique de Rouvres-en-Plaine. Extraits de la transcription publiée dans : David, Henri. Quelques artistes méridionaux en Bourgogne. In : Annales du Midi : revue archéologique, historique et philologique de la France méridionale, tome 47, n°188, 1935. p. 329-364. p. 342-343.
En nom de Nostre-Seigneur, amen. L'an de l'Incarnacion d'icellui courant mil quatre cens quarente et huit, le dix-neufiesme jour du mois de may, Je Pierre Floix, prebstre, curé de Rouvre, du diocèse de Chalon, savoir faiz à tous présens et advenir qui verront ou ourront ces présentes lettres, comme honnorable homme Phelippe Mâchefoin, conseillier, premier varlet de chambre et garde des joyaulx de monseigneur le duc de Bourgoigne, cappitain et son chastellain dudit Rouvre, mehu de bonne dévocion et charité et affin que moy et mes successeurs, curés dudit Rouvre soions tenus de prier Dieu, la très glorieuse Vierge Marie, sa mère, monseigneur saint Jehan Baptiste, monseigneur saint Jean l'Euvangéliste et tous les autres glorieux sains et saintes de la très haulte cour célestial de paradis, pour le remède et salut des âmes de luy, Symonnote de Tard, sa femme, et pour feurent ses très chiers père et mère, Monnot Mâchefoin et Jehannote de Courcelles, sa femme, Monnot Rosier et Colin Mâchefoin, ses grans pères, ses frères et suers et autres ses parens et amyz charnelx cui Dieu pardoint, pour lesquelx il est tenu de prier ; et affin aussi que luy et ladicte Symonnote, sa femme, soient participans et accompaigniez en tous les biens faiz et oroisons qui doresnavant ce feront et diront en laditte église de Rouvre, icellui Phelippe m'ait aujourduy donné et octroyé perpétuellement pour moy et mesdiz successeurs curés dudit Rouvre ou temps advenir, en augmentacion de ladicte cure et aussi en augmentacion et entretenement de la confrarie dudit monsieur Saint Jehan Baptiste instituée et ordonnée en ladicte église de Rouvre, de laquelle confrarie ledit Phelippe et sa dicte femme sont confrères et conseurs, les rentes, censes, revenues et héritaiges qui s'ensuivent [...]. Et ladicte donnacion, augmentacion et octroy ledit Phelippe Mâchefoin ait fait à moy ledit curé de Rouvre pour et parmy ce que je ledit curé suis et seray tenus pour moy et mesditz successeurs [...] de dire et célébrer, ou faire dire et célébrer en ladicte église perrochial dudit Rouvre à l'autel de la chapelle Nostre-Dame qu'il a fait faire de nouvel, quatre basses messes chacune sepmaine de l'an à tousjours mais perpétuellement.

Archives départementales de la Côte-d'Or. B II 360/3. Cours et juridictions. Justices communales. Justice criminelle, Ville de Dijon (1442-1448). Extraits de la transcription publiée dans : [Exposition. Dijon, Musée des Beaux-Arts. 1972]. Jean de La Huerta et la sculpture bourguignonne. Dir. Pierre Quarré. Dijon : Musée de Dijon, Palais des Ducs de Bourgogne, 1972, p. 33-35.
Information faite par moy Thiébault Liégeard substitut de honnorable homme Jehan Rabustel, procureur général de la ville et commune de Dijon, et en son absence. Aujourdhuy Xe du moys de décembre l'an mil CCCCXLVIII de et sur ce que l'en dit que le lundi précédent, le IXe jour dudit mois devant l'ostel Arnolet de Buis près la posterne de l'ostel de Crux ung nommé Jehan de Drogues, ymaigeur, demourant audit Dijon a vouslu frapper de une daigue honorable homme et saige sire Philippe Machefoing maïeur de ladite ville et dament par la gorge et juré par la mort Dieu par plusieurs fois et dit audit maire qu'il estoit mieulx officier de Monseigneur le duc que luy. Et jasoit ce que ledit maieur avoit ses deux sergens devant luy et aussi tutoyé ledit Monseigneur le maire par plusieurs foys. Sur le quel cas je me suis informé par les tesmoings qui s'ensuivent. Les quels ont dépposé par leurs sermens pour ce donnez aux sains euvangiles de Dieu Notre Seigneur savoir dudit cas ce qui s'ensuit.
Premièrement. Honnorable homme Colin Lomme bourgeois et eschevin dudit Dijon aaigié de XL ans comme il dit, dit savoir du cas ce qui sensuit. C'est assavoir que lundi derrier passé environ l'eure de IX heures avant midi il venoit devers la chapelle et vit et ouy que ledit monseigneur le maieur et Jehan de Drogues avoient débat ensemble et pour ce se avanca et mit entre deus, et luy estant vers eulx, vit ledit monseigneur le maire qui dit audit de Drogues : Jehannin, faictes moy mon ouvraige, car vous avés jà eu XII frans de moy et si n'ovrés point pour moy et si me devés une queue widange. Lequel Jehannin lui respondit : Par la mort dieu, il n'en est riens et n'ovreray ja pour vous, se vous ne me faictes le paiement de XXIIII frans dont desja j'ai receu de vous XII frans seullement. Lequel monseigneur le maire respondi doulcement audit de Drogue : Vous savés bien que mon marchié est tel que je ne vous doy rien baillier oustre lesdis XII frans jusques à ce que mon ovraige soit fait. Lesquel Jehannin incontinent très despiteusement dit audit Maieur : Par la mort Dieu, il n'en est riens et lors ledit Maïeur lui respondit qu'il mentoit en soy approchant de luy et incontinant ledit de Drogues de courage mal meu tira sa daigue quatre dois dehors la gaingne disant que se ledit Maieur le frappoit qu'il le refrapperoit et qu'il estoit aussi bien mieulx à Monseigneur que estoit ledit maïeur. Et plus du cas n'en scet sur ce souffisamment requis. [...].
Aire d’étude et canton : Bourgogne-Franche-Comté
Dénomination : statue
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