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FERME, FORGE ET ATELIER D'HORLOGERIE (FABRIQUE D'HORLOGES MONUMENTALES) PRÊTRE

25 - Rosureux

1-3 impasse de la Truite

  • Dossier IA25001916 réalisé en 2018 revu en 2019
  • Auteur(s) : Laurent Poupard
Vue d'ensemble rapprochée, depuis le nord-ouest. De gauche à droite : forge, maison et ferme. © Région Bourgogne-Franche-Comté, Inventaire du patrimoine

Historique


Dessinée sur le plan cadastral de 1832 (B 30), la ferme appartient alors au tanneur Xavier Daigney (1776-1846). Celui-ci la reconstruit en 1835 (date portée sur un linteau avec les initiales XD), après sa destruction lors de l’incendie du village dans la nuit du 19 au 20 mars 1834. Daigney est aussi propriétaire du petit battoir d’écorces voisin (B 147), dont la roue hydraulique verticale est établie sur le ruisseau du Fondereau au confluent de ce dernier avec le Dessoubre. Ce battoir est mitoyen d’une forge (B 146), aussi dotée d’une roue hydraulique, propriété de la veuve et des héritiers d’Alexandre Simon. Un Simon avait pris en 1547 à cens le moulin du sacristain de Vaucluse (par la suite dit moulin banal) et la même famille fournit au 18e siècle plusieurs des maîtres cloutiers de Rosureux (avec les Pêcheur, Robert, etc.). Victor Daigney (1811 ou 1812- ?) succède à son père et achète vers 1847 la forge à François Bourgeat, qui en est propriétaire depuis 1841 environ.
Les biens de Daigney sont partagés en 1852 ou 1853 : une partie de la ferme échoit à Marie Josephte Joly, veuve de son frère Jean-Baptiste (décédé en 1852), qui se remarie en 1853 avec Chrysostome Pêcheur (François Chrysostome, 1817-1858). Cette partie est restée dans la famille Pêcheur jusqu’à nos jours. Le reste de la propriété est acquis par le mécanicien et horloger Lucien Prêtre. L’Annuaire du Doubs de 1852 reflète d’ailleurs cette partition dans sa statistique de l’utilisation des rivières et ruisseaux. Il recense l’établissement de Pêcheur (en amont de la forge) - un moulin à blé à deux paires de meules, une scie monolame ("1 feuille de scie verticale") et une ribe, actionné par deux roues hydrauliques -, avec cette observation : "pas de chômage. 10 000 fr. d’affaires par an". A propos de celui de Prêtre : "forge de taillanderie, atelier de construction, machine à battre (4 roues)", avec pour observation : "quelque chômage. 4 000 fr. d’affaires par an".
Lucien Prêtre (Pierre Ignace dit Lucien, 1813-1884) est le fils de Théophile Prêtre (1782-1842), cultivateur à Narbief à partir de 1800 environ mais aussi fabricant de mouvements d’horloges monumentales. Associé avec Ferréol Guillemin (vers 1779-1839), il réalise des mouvements "cage fer" en fer forgé (l’un d'entre eux est encore visible à Voillans). Théophile se consacre à partir de 1810 à la fabrication des horloges, au Bizot. Pour agrandir son affaire et bénéficier d’une force motrice permettant de mettre en jeu ses machines, Lucien la transfère donc au milieu du siècle dans la ferme Daigney, qui lui sert d’habitation, et dans la forge de taillanderie attachée. Il modifie les bâtiments : le battoir vers 1857 et la ferme vers 1876 (d’après la matrice cadastrale), la forge en 1865 (date portée sur un linteau avec les initiales P et CIL).
Ses fils Asther (Asther Joseph Théophile, 1844-1919), marié en 1877 avec une nièce de Chrysostome Pêcheur, et César (Benjamin Alix César, 1846-1877) le rejoignent dans l’entreprise. Au décès de César (à 31 ans), Asther se trouve seul à la tête de l’affaire, qu’il développe tout en employant certainement au maximum une dizaine de personnes. La forge accueille à l’étage l’atelier, avec un établi continu derrière chaque rangée de fenêtres, tandis que la ferme abrite le travail de précision (à l’étage), soit la fabrication des cadrans (fixés sur un support en bois fruitier), le réglage et les finitions, ainsi que l'habitation d'Asther (côté rivière) et une salle à manger pour les ouvriers (côté rue).
Une brochure de la société Asther Prêtre Fils, éditée dans le dernier quart du 19e siècle, énumère la production : "horloges d’églises, hôtels de ville, usines, chemin de fer, collèges, mairies ; régulateurs de précision, compteurs et machines diverses, fentes d’engrenages, instruments de précision". Production vendue sur le marché national (Doubs, Haute-Saône, Jura, Saône-et-Loire, Vosges, Haut-Rhin, Vaucluse, Gard, Hérault, Lot, Puy-de-Dôme, Haute-Loire, Cantal et Aveyron) et en Suisse (mais aussi en Espagne, en Amérique du Sud, etc.). Mettant en avant calculs, "application la plus rigoureuse des principes de la mécanique et de l’horlogerie" et "machines spéciales" pour la fabrication (travaillant avec une précision de l’ordre du centième de millimètre), il explique utiliser bronze, acier trempé, fer et fonte. Cette dernière est fournie par une fonderie de Seloncourt tandis que les cadrans émaillés viennent de Morez, des entreprises Malfroy puis Renaud (ils peuvent aussi être en fer peint ou en verre). Les roues hydrauliques ont certainement déjà laissé la place à une turbine.
A Asther succèdent ses deux fils : Lucien (Lucien Jules Asther, 1891-1937) et César (Paul César, 1895-1976), mais ce dernier s’établit rapidement cultivateur, travaillant pour l’horlogerie "sur la fenêtre" uniquement. Lucien poursuit donc l’entreprise, reprise par ses deux fils : Henri (1912-1984) et Robert (1916-2009). Le premier s’oriente vers la mécanique générale et le dépannage des machines de scierie puis liquide l’atelier, arrêté lors de la Deuxième Guerre mondiale, tandis que le deuxième part travailler à Vélars-sur-Ouche (Côte-d’Or) dans la fonderie de cloches d’Adolphe Farnier (il démarrera en 1950 sa propre affaire d’horlogerie à Cour-Saint-Maurice : voir en annexe). Les bâtiments ont depuis été convertis en habitation.
Période(s)
Principale :
  • 2e quart 19e siècle
  • 3e quart 19e siècle
  • 4e quart 19e siècle
Date(s)
1835 : porte la date
1865 : porte la date

Description


Le site comporte trois bâtiments principaux : à l'ouest celui reconstruit en 1835 par Daigney, mitoyen au nord celui ayant abrité une partie des installations et le logement Prêtre, séparée à l'est l'ancienne forge modifiée en 1865. Ces bâtiments ont des murs en moellons calcaires enduits, avec essentage de planches dans les pignons, et des toits à longs pans et couverture de tuiles mécaniques. L'ancienne forge est formée de deux corps perpendiculaires, à étage carré et étage en surcroît, dont le toit associe pignon couvert au sud et à l'est à une demi-croupe à l'ouest. Les murs de l'étage en surcroît du corps orienté nord-sud sont en lattis de plâtre ; l'étage carré de ce corps est largement ouvert d'une rangée de fenêtres multiples vers l'ouest et de fenêtres horlogères à l'est. L'habitation Prêtre, dont les murs nord et ouest ont été décrépis, est coiffée d'un toit à croupes et comporte sous-sol, étage carré et comble. La ferme, qui a un pignon couvert à l'est et une demi-croupe à l'ouest, compte deux étages carrés et un comble. Habitation et ferme sont chacune partiellement desservies par une rampe d'accès (levée de grange) au sud, côté où la deuxième présente une belle galerie en bois.
Murs :
  • calcaire
  • moellon
  • enduit partiel
  • essentage de planches
Toit :
  • tuile mécanique
Etages :
  • 2 étages carrés
  • étage de comble
Elévation :
  • élévation à travées
Escalier :
  • escalier dans-oeuvre
Autre :
  • rampe d'accès
Typologie :
  • baie horlogère
  • baie multiple
Energie utilisée :
  • énergie hydraulique produite sur place

Source(s) documentaire(s)

  • 3 P 505 Cadastre de la commune de Rosureux, 1832-1934
    3 P 505 Cadastre de la commune de Rosureux, 1832-1934- 3 P 505 : Atlas parcellaire (5 feuilles), 1832- 3 P 505/1 : Registre des états de sections, [1833]- 3 P 505/2 : Matrice cadastrale des propriétés bâties et non bâties, [1834-1913]- 3 P 505/3 : Matrice cadastrale des propriétés bâties, 1882-1910- 3 P 505/4 : Matrice cadastrale des propriétés non bâties, 1914-1934- 3 P 505/5 : Matrice cadastrale des propriétés bâties, 1911-1934
    Lieu de conservation : Archives départementales du Doubs, Besançon - Cote du document : 3 P 505
  • Archives de la société Prêtre à Mamirolle, 19e-21e siècles
    Archives de la société Prêtre à Mamirolle, 19e-21e sièclesNotamment un registre d'inventaire intitulé "Horloges posées par Prêtre Asther Fils, Horloger Mécanicien à Rosureux (Doubs) 1885".
  • Statistique de l'utilisation de la force motrice des eaux, 1851
    Statistique de l'utilisation de la force motrice des eaux. In Annuaire départemental du Doubs pour 1852, 40e année, 1851, p. 103-158.
  • Fabrique spéciale d’horloges publiques Prêtre Asther Fils [...], 4e quart 19e siècle
    Fabrique spéciale d’horloges publiques Prêtre Asther Fils [...]. - Besançon : Impr. Abel Cariage, s.d. [4e quart 19e siècle]. 13 p. : 1 pl. dépl. h.t. (20,5 x 28 cm) ; 20,5 cm.
    Lieu de conservation : Archives de la société Prêtre et Fils, Mamirolle
  • En-tête de la Fabrique spéciale d'Horloges monumentales Prêtre Fils, constructeur à Rosureux (Doubs), limite 19e siècle 20e siècle
    En-tête de la Fabrique spéciale d'Horloges monumentales Prêtre Fils, constructeur à Rosureux (Doubs), limite 19e siècle 20e siècle
  • Fabrique d’horloges monumentales Prêtre & ses Fils [dépliant publicitaire], 1er quart 20e siècle
    Fabrique d’horloges monumentales Prêtre & ses Fils [dépliant publicitaire]. - S.l. : s.n., s.d. [1er quart 20e siècle]. 42 x 27 cm.
    Lieu de conservation : Archives de la société Prêtre et Fils, Mamirolle
  • Fabrique d’horloges monumentales Prêtre Père & Fils [affiche publicitaire], 1909
    Fabrique d’horloges monumentales Prêtre Père & Fils [affiche publicitaire]. - Paris : Impr. Grandperrin, s.d. [1909]. 42 x 27 cm.
    Lieu de conservation : Archives de la société Prêtre et Fils, Mamirolle
  • Horloge à sonnerie des quarts et heures système Prêtre Fils, 4e quart 19e siècle
    Horloge à sonnerie des quarts et heures système Prêtre Fils, dessin imprimé, s.n., s.d. [4e quart 19e siècle], 20,5 x 28 cm. Pl. dépl. placée en tête d’une notice intitulée : Fabrique spéciale d’horloges publiques Prêtre Asther Fils [...]
    Lieu de conservation : Archives de la société Prêtre et Fils, Mamirolle
  • [Horloge d’Arc-sous-Cicon], limite 19e siècle 20e siècle
    [Horloge d’Arc-sous-Cicon], photographie, s.n., s.d. [limite 19e siècle 20e siècle]
    Lieu de conservation : Archives de la société Prêtre et Fils, Mamirolle
  • [Portrait de Lucien Prêtre (1813-1884)], 4e quart 19e siècle
    [Portrait de Lucien Prêtre (1813-1884)], photographie, par E. Gartheis au Locle (Suisse), s.d. [4e quart 19e siècle]
    Lieu de conservation : Archives de la société Prêtre et Fils, Mamirolle
  • [Carte d’exposant d’Asther Prêtre à l’Exposition universelle de 1878 à Paris]
    [Carte d’exposant d’Asther Prêtre à l’Exposition universelle de 1878 à Paris], photographie, s.n., 1878
    Lieu de conservation : Archives de la société Prêtre et Fils, Mamirolle
  • [Asther Prêtre et un deuxième personnage devant l’atelier], vers 1895 ?
    [Asther Prêtre et un deuxième personnage devant l’atelier], photographie, s.n., s.d. [vers 1895 ?]
    Lieu de conservation : Archives de la société Prêtre et Fils, Mamirolle
  • [Asther Prêtre en famille, avec un personnage non identifié, devant sa maison], vers 1895 ?
    [Asther Prêtre en famille, avec un personnage non identifié, devant sa maison], photographie, s.n., s.d. [vers 1895 ?]
    Lieu de conservation : Archives de la société Prêtre et Fils, Mamirolle
  • [Vue d’ensemble de l’atelier], 1er quart 20e siècle ?
    [Vue d’ensemble de l’atelier], photographie, par Jouffroy à Ornans, s.d. [1er quart 20e siècle ?]
    Lieu de conservation : Archives de la société Prêtre et Fils, Mamirolle
  • [Portrait de Lucien Prêtre (1891-1937)], 1ère moitié 20e siècle
    [Portrait de Lucien Prêtre (1891-1937)], photographie, s.n., s.d. [1ère moitié 20e siècle]
    Lieu de conservation : Archives de la société Prêtre et Fils, Mamirolle
  • Monneret, Christian. Recherches généalogiques
    Monneret, Christian. Recherches généalogiques. Accessibles en ligne sur le site de Geneanet : http://gw.geneanet.org/
  • Prêtre, Alain. Recherches généalogiques
    Prêtre, Alain. Recherches généalogiques. Accessibles en ligne sur le site de Geneanet : http://gw.geneanet.org/
  • Boiteux, Marie-Claire. Les rouages de l’excellence, 25 mars 2017
    Boiteux, Marie-Claire. Les rouages de l’excellence. L’Est républicain, édition du Doubs, samedi 25 mars 2017, ill.
  • Courtieu, Jean (dir.). Dictionnaire des communes du département du Doubs, 1982-1987.
    Courtieu, Jean (dir.). Dictionnaire des communes du département du Doubs. - Besançon : Cêtre, 1982-1987. 6 t., 3566 p. : ill. ; 24 cm.
  • Prêtre, Christian. Prêtre et Fils : sept générations d’horlogers mécaniciens, 2017
    Prêtre, Christian. Prêtre et Fils : sept générations d’horlogers mécaniciens. In : L’horlogerie, fille du temps : actes du cycle de conférences dans le massif du Jura, septembre 2016-juin 2017. - Besançon : Association française des Amateurs d’Horlogerie ancienne, 2017, p. 109-114 : ill.
  • Vuillet, Bernard. Entre Doubs et Dessoubre en 1900. Tome I, Le canton du Russey, 1982
    Vuillet, Bernard. Entre Doubs et Dessoubre en 1900. Tome I, Le canton du Russey, d'après la collection de cartes postales de Georges Caille. - Les Gras : B. Vuillet, 1982. 360 p. : cartes postales ; 31 cm.
  • Pêcheur Jacques et Marie-Christine (témoignage oral)
    Pêcheur Jacques et Marie-Christine, propriétaires d'une partie de l'ancienne ferme Daigney. Rosureux
  • Prêtre Christian (témoignage oral)
    Prêtre Christian, fils de Robert Prêtre et père de Nicolas Prêtre, dirigeant de la société Prêtre et Fils.
  • Prêtre Jacky (témoignage oral)
    Prêtre Jacky, fils d’Henri Prêtre et cousin de Christian Prêtre. Avanne-Aveney

Informations complémentaires


Lucien Prêtre (Pierre Ignace dit Lucien, 1813-1884) descend d’une famille attestée en 1520 à Boncourt (canton du Jura, Suisse), qui s’installe en France en 1640. Il est le fils de Théophile Prêtre (1782-1842), cultivateur à Narbief à partir de 1800 environ, lequel réalise aussi, associé avec l’horloger Ferréol Guillemin (vers 1779-1839), quelques mouvements d’horloges monumentales en fer forgé (une est attestée à Voillans). Sur un papier à en-tête, la maison Prêtre est réputée fondée en 1780 sans que cette date ne soit explicitée : renvoie-t-elle à une activité horlogère de Claude Ignace Prêtre (vers 1744-1825), le père de Théophile ?
Lucien s’établit au Bizot où, à partir de 1810, il se consacre à la fabrication des horloges. Pour agrandir son affaire et bénéficier d’une force motrice permettant de mettre en jeu ses machines, il achète au milieu du siècle une propriété à Rosureux : une partie de la ferme Daigney, qui lui sert d’habitation, et la forge de taillanderie attachée. Il modifie les bâtiments : le battoir vers 1857 et la ferme vers 1876 (d’après la matrice cadastrale), la forge en 1865 (date portée sur un linteau avec les initiales P et CIL). Ses fils Asther (Asther Joseph Théophile, 1844-1919), marié en 1877 avec une nièce de Chrysostome Pêcheur, et César (Benjamin Alix César, 1846-1877) le rejoignent dans l’entreprise.

Tout en employant certainement au maximum une dizaine de personnes, celle-ci se développe sous l’impulsion d’Asther, ingénieux (il invente une fraiseuse mécanique permettant de tailler simultanément les dents de sept ou huit roues) et commerçant. Une brochure de la société Asther Prêtre Fils, éditée dans le dernier quart du 19e siècle, mentionne le diplôme d’honneur obtenu à Paris en 1865 et les médailles, de bronze à Lyon en 1872, d’argent à Besançon en 1860, à Lyon et Paris en 1878, à Voltri en Italie (et par la suite à Besançon en 1893, lors de l’exposition du centenaire). La production est énumérée : "horloges d’églises, hôtels de ville, usines, chemin de fer, collèges, mairies ; régulateurs de précision, compteurs et machines diverses, fentes d’engrenages, instruments de précision". Production vendue sur le marché national (Doubs, Haute-Saône, Jura, Saône-et-Loire, Vosges, Haut-Rhin, Vaucluse, Gard, Hérault, Lot, Puy-de-Dôme, Haute-Loire, Cantal et Aveyron) et en Suisse (mais aussi en Espagne, en Amérique du Sud, etc.).
Dans cette brochure, Asther rédige tout un chapitre sur la "Nécessité de la mesure du temps". Il écrit : "A aucune époque comme de nos jours, où les chemins de fer et la navigation à la vapeur tendent à remplacer les anciennes voies de communication, l’on a senti aussi vivement la nécessité de la mesure exacte du temps ; les Horloges deviennent d’autant plus indispensables que les départs des convois et les stationnements des bateaux se trouvent réglés à la minute. L’industrie qui se développe de plus en plus dans nos contrées, ne réclame pas moins de précision dans les fonctions des horloges publiques, pour l’emploi et le partage du temps dans le travail des usines et ateliers. D’un autre côté, l’agriculture qui est aussi en voie de progrès commence à comprendre les avantages d’une division exacte du temps. L’importance d’une bonne horloge dans une commune se fait, encore sentir lorsqu’il faut régler le service divin ainsi que les travaux toujours renaissants de la vie civile. Dans les villes de garnison une horloge à marche régulière n’est pas moins indispensable ; car autrement l’heure militaire ne serait plus qu’un vain mot. Enfin, de nos jours, où vivre c’est agir, nous comprenons parfaitement pourquoi les Anglais et les Américains du Nord, qui nous ont devancés dans le développement industriel et agricole, tiennent tant à la valeur du temps quand ils disent : « Time is money (le temps est un capital) »."
Mettant en avant calculs, "application la plus rigoureuse des principes de la mécanique et de l’horlogerie" et "machines spéciales" pour la fabrication (travaillant avec une précision de l’ordre du centième de millimètre), il explique utiliser bronze, acier trempé, fer et fonte. Cette dernière est fournie par une fonderie de Seloncourt tandis que les cadrans émaillés viennent de Morez, des entreprises Malfroy puis Renaud (ils peuvent aussi être en fer peint ou en verre). Les roues hydrauliques ont alors certainement déjà laissé la place à une turbine. Animé par un poids de 2 à 4 kg (au lieu de 100 à 200 kg auparavant), chaque mouvement est installé dans une armoire de protection en bois.

A Asther succèdent ses deux fils : Lucien (Lucien Jules Asther, 1891-1937) et César (Paul César, 1895-1976), mais ce dernier s’établit rapidement cultivateur, travaillant pour l’horlogerie "sur la fenêtre" uniquement. Lucien poursuit donc l’entreprise, reprise par ses deux fils : Henri (1912-1984) et Robert (1916-2009). Le premier s’oriente vers la mécanique générale et le dépannage des machines de scierie puis liquide l’atelier, arrêté lors de la Deuxième Guerre mondiale, tandis que le deuxième part travailler à Vélars-sur-Ouche (Côte-d’Or) dans la fonderie de cloches d’Adolphe Farnier, où il fabrique et pose des moteurs de volée.
Robert Prêtre revient dans le Doubs en 1950 et ouvre sa propre affaire à Cour-Saint-Maurice, dans un ancien garage de réparation d’automobiles à la sortie du village sur la route de Maîche. Il transfère en 1956 son activité à Bretonvillers. Il y achète un bâtiment en rez-de-chaussée (actuel 28 rue de Gigot, cadastré 2019 B 292, 293, 360, 361), construit pour être un garage, auquel il fait ajouter un étage pour son logement par l’entrepreneur Della Chiesa, de Cour-Saint-Maurice. L’atelier de mécanique est au rez-de-chaussée et celui de menuiserie dans un petit bâtiment ajouté au sud. Il emploie un ouvrier et fabrique, avec des pièces détachées subsistant des stocks de l’entreprise paternelle, des mouvements puis cesse cette production tout en poursuivant celle des cadrans, des aiguilles et de l’ensemble des accessoires d’horlogerie. Il se consacre surtout à l’électrification des horloges et des systèmes de sonnerie des cloches, et il est très actif sur ce créneau, notamment dans le Jura. Il transforme les horloges mécaniques en horloges à remontage automatique et pose des horloges électromécaniques développées par la société Terraillon, de Perrigny (Jura).
Les deux fils de Robert, Christian et Patrice, rejoignent leur père puis le premier est embauché chez Bodet (société créée en 1868 à Trémentines, Maine-et-Loire), avant de se mettre à son compte en Isère en 1978. De retour dans l’entreprise familiale, il la transfère à Mamirolle où son frère et lui font construire en 1979-1980 leur atelier et leurs deux habitations. Ils travaillent donc en famille, tous les trois, jusqu’au départ de Patrice (qui s’établit fabricant d’horloges comtoises) en 1985. Deux personnes sont embauchées l’année suivante puis une troisième en 1990. Robert prend sa retraite au milieu des années 1990 et Christian poursuit l’activité en s’attachant à conserver les compétences nécessaires à la restauration des horloges mécaniques et particulièrement de celles à forte complexité, comme les horloges astronomiques (il restaure ainsi celle de Beauvais).
La société Prêtre et fils passe en 2009 à son fils Nicolas. En 2018, alors que se pose la question de son extension, elle compte six personnes (dont Christian et Nicolas) plus une secrétaire à mi-temps. Elle conçoit et fabrique toujours des horloges monumentales mécaniques, et entretient plus d’un millier d’installations campanaires.

Fabrique spéciale d’horloges publiques Prêtre Asther Fils [...] - Besançon : Impr. Abel Cariage, s.d. [4e quart 19e siècle]. 13 p. : 1 pl. dépl. h.t. (20,5 x 28 cm) ; 20,5 cm.
Thématiques :
  • patrimoine industriel du Doubs
Aire d’étude et canton : Pays horloger (le)
Complément de localisation :
  • anciennement région de Franche-Comté
Hydrographie : le Fondereau
Dénomination : ferme, forge, atelier
Parties constituantes non étudiées :
  • atelier de fabrication
  • logement
  • étable
  • grange
  • cantine
  • garage
  • rigole d'alimentation
  • rampe d'accès
  • jardin potager
  • parc
  • cour
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