LE PAYS HORLOGER ET SON PATRIMOINE INDUSTRIEL

  • Dossier IA25001311 réalisé en 2013 revu en 2014
  • Auteur(s) : Laurent Poupard
Vue d'ensemble de la ville de Charquemont en hiver, depuis la Combe Saint-Pierre. © Région Bourgogne-Franche-Comté, Inventaire du patrimoine

Historique


Inscrit dans le département du Doubs (IA25001338), le Pays horloger est une structure administrative récente, fondée en 1995, constituée à partir d'un sentiment identitaire fort cristallisé autour d'une industrie phare : l'horlogerie.

Localisation


Formant le flanc oriental du département, le Pays horloger recouvre principalement le second plateau entre les vallées du Doubs et du Dessoubre, avec une zone plus mouvementée au sud-ouest (zone du Mont Châteleu, des Gras et des Combes) et une partie du premier plateau au nord-ouest autour de Belleherbe. Le paysage est essentiellement rural avec une agriculture organisée autour de la production laitière et – mais c'est bien moins vrai de nos jours – de l'élevage du cheval comtois. Ces espaces, où la forêt le dispute aux pâtures, sont ponctués de quelques villes : les chefs-lieux de canton que sont Morteau, Le Russey, Maîche et Saint-Hippolyte, mais aussi des bourgs tels Villers-le-Lac, Charquemont et Damprichard.
Le périmètre du Pays (validé en 2001) concerne les quatre cantons mentionnés (plus deux communes de celui de Pont-de-Roide), soit 78 communes pour 760 km2 et 40 500 habitants environ. Cette structure constitue le noyau d'un futur parc naturel régional transfrontalier, qui reposera en fait sur la coopération de deux PNR adossés : un parc suisse (le PNR Doubs, créé en 2013 et regroupant 16 communes) et un parc français (le PNR du Doubs horloger, en cours de définition en 2014 et réunissant 95 communes dans son emprise maximale). A noter que le Comité syndical du Pays horloger est devenu Pôle d'Equilibre territorial et rural du Pays horloger en février 2015 et qu'il s'appuie sur trois communautés de communes (du Val de Morteau, du Plateau du Russey et du Pays de Maîche) regroupant 68 communes.

Repères historiques


Marqué par la guerre de Dix Ans (1635-1644), l'annexion par la France (en 1678), la peste et la famine, le 17e siècle est éprouvant et voit la disparition des deux tiers de la population du Haut-Doubs. Le siècle suivant est celui de la reconstruction, du repeuplement (par des Savoyards et des Suisses) et d'un changement profond de la société initié par la Révolution. Le 19e siècle se caractérise par un essor économique important – qui voit l'industrie horlogère s'implanter durablement (en sous-traitance pour la Suisse) et l'agriculture se spécialiser dans l'élevage – et par la progression de la laïcité. Conflits mondiaux et crises marquent le 20e ; l'horlogerie, devenue triomphante, s'étiole à partir des années 1970 face au changement technologique majeur apporté par le quartz et à la mondialisation, et les emplois se déplacent en Suisse ; l'industrie laitière se maintient grâce au développement d'une filière fromagère axée sur la qualité (comté).

Une industrie diversifiée, dominée par l'horlogerie


L'abondance des eaux du Doubs et du Dessoubre a favorisé une industrie traditionnelle à forte dominante métallurgique, puis permis une électrification précoce du Haut-Doubs avec la création en 1895 de la centrale hydroélectrique de la Goule (Suisse) puis en 1909 de celle du Refrain (sur la commune de Fournet-Blancheroche).
La verrerie, florissante au 18e siècle, n'a pas laissé de trace bâtie sinon, pour celle de Fournet-Blancheroche, une cave voûtée au bord du Doubs (sous le lieu-dit Châtelard de la carte IGN). Le souvenir en est conservé par les pierres tombales de l'église Saint-Maurice de Fessevillers et quelques exemples de bouteilles et verres fabriqués localement.
Si le travail du bois et la fromagerie sont les deux industries de base du secteur, l'agroalimentaire est aussi représenté à Morteau par une brasserie et chocolaterie. Le travail des métaux reste une spécialité de la zone : fonderie de cloches, fabrique de machines à coudre et vélos ou de pièces détachées pour l'automobile à Morteau, fabrique de matériel de fromagerie et chaudières à Trévillers, de graisseurs et chignoles à Damprichard, de couverts de table à Montlebon, etc. L'influence de l’horlogerie se fait sentir : outillage à main et petites machines pour horlogers sortent de Montécheroux et des Gras ; décolletage et emboutissage constituent une alternative aux difficultés de la filière.

L’industrie phare du Pays horloger reste – bien évidemment – l'horlogerie.
La petite horlogerie (les montres) s’est installée au 18e siècle dans la Franche Montagne (région de Maîche, Le Russey et Morteau), à cheval sur la France et la Suisse. Les conditions y sont favorables : tradition métallurgique, hiver long imposant au paysan la pratique d'une activité complémentaire, etc. Fabrication "en parties brisées", elle s'épanouit au sein du système de l'établissage qui voit chaque horloger réaliser à domicile une passe particulière ou un type précis de pièce, le montage du produit final étant assuré par l'établisseur installé en ville.
Lorsque cette industrie prend son essor dans la seconde moitié du 19e siècle, le paysan-horloger devient horloger-paysan tandis que s'étoffe le milieu ouvrier des bourgs, où se créent ateliers et usines. Le val de Morteau, particulièrement dynamique avec son école d’horlogerie, attire la main-d'œuvre helvétique (535 Suisses viennent y travailler en 1857). Les Français, qui ont de 1840 à 1950 un quasi-monopole pour la fabrication des échappements à cylindre, fournissent la plupart des fabriques de montres suisses. Une hausse conséquente des droits de douane dans les années 1890 les conduit cependant à produire eux-mêmes des montres entières, écoulées sur un vaste marché intérieur englobant l'empire colonial. Il n'en demeure pas moins que des 14 fabriques d'ébauches (de montres et de réveils) répertoriées en 1947, 9 sont du Doubs - soit 6 du Haut-Doubs (Cupillard et Parrenin à Villers-le-Lac, Dodane Frères et Mercier à Morteau, Fabrique d'Ebauches de Maîche - auparavant Maire et Perrier - et Jeambrun à Maîche) et 3 de Besançon (Compagnie industrielle horlogère - Ultra -, Lip et Zenith) - ; 4 sont de Haute-Savoie (Crettiez à Sallanches, Dama et Lorsa - Horlogerie de Savoie - à Annemasse, Sofranhor à Cluses) et la dernière (Uti-Jaccard) est basée à Paris mais avec un atelier à Villers-le-Lac
Le nombre des sociétés horlogères ne cesse d'augmenter, connaissant une véritable explosion après la deuxième guerre mondiale, jusqu'aux années 1970 où ce mouvement se brise contre la mondialisation d'une part (concurrence des pays asiatiques) et d'autre par la rupture technologique liée à l'apparition des mouvements à quartz. De concentrations en fermetures, la filière se vide alors de sa substance et bien peu d'entreprises subsistent aujourd’hui. Les emplois horlogers sont dorénavant majoritairement localisés en Suisse (dans le canton de Neuchâtel, la moitié des postes est occupée par des travailleurs frontaliers).

L'inventaire du patrimoine industriel du Pays horloger


La convention de coopération signée le 4 novembre 2013 entre la Région Franche-Comté et le Syndicat mixte du Pays horloger fixe le cadre de l'étude. Elle précise que si l'inventaire "a vocation à mettre en exergue le patrimoine horloger dans le cadre de la préfiguration du Parc naturel régional [...] par souci de cohérence et de logique en rapport avec les autres couvertures réalisées sur le patrimoine industriel, le chercheur examinera la totalité du patrimoine industriel en prenant en compte les cantons dans leur ensemble et les activités autres qu'horlogères."
Pour évaluer l'importance de cette dernière industrie, un premier sondage a été effectué à l'été 2012 sur les cinq communes du Pays principalement concernées par elle : Morteau, Villers-le-Lac, Maîche, Charquemont et Damprichard. Il a révélé un potentiel minimum de 500 sites, d'où la décision de restreindre le corpus en demeurant exhaustif pour les usines et ateliers clairement identifiables, et en étant sélectif dans le cas des fermes-ateliers ou des maisons-ateliers. Cette sélectivité s'appuie sur les informations apportées par différentes sources (bibliographie, annuaires, archives, cartes postales, etc.), dont le dépouillement a commencé dès 2012, et sur celles issues d'un réseau de correspondants locaux (anciens horlogers ou non, historiens, etc.), tels Jacques Donzé à Charquemont, Michel Simonin à Maîche, Yves Droz, Jacques Renaud-Bezot et Jean-Claude Vuez à Villers-le-Lac, les mêmes Droz et Vuez avec Henri Bonnet, Henri Leiser, Grégory Maugain, Denis Stein et Jean-Pierre Viennet à Morteau, le musée de la Pince à Montécheroux, etc.
Autre adaptation apportée en réponse aux attentes du Syndicat mixte : tout ce qui concerne le patrimoine horloger est pris en compte sans soucis de limite chronologique, donc en intégrant également les usines et les ateliers les plus récents.

Il est cependant rapidement apparu que l'étude était concomitante de l'achèvement de la disparition du monde horloger et surtout de sa mémoire. En effet, les personnes ayant pratiqué l'horlogerie ou connu ce domaine en activité étant de plus en plus rares et âgées, à leur décès s'évanouissait souvent la seule source d'information disponible sur une période relativement proche mais de fait mal connue. Il a donc été décidé d'établir un dossier sur chaque atelier suffisamment documenté afin d'en conserver une trace, si minime soit-elle.
Atelier qui a pu se réduire à un établi placé devant une fenêtre dans une pièce chauffée de la maison ou de l'appartement (il est souvent question, pour évoquer le travail à domicile, du travail "à l'établi" ou "sur la fenêtre"), avant de se voir dédier une pièce ou un corps de bâtiment. Pour rendre à une activité aussi discrète sa visibilité au sein d'une base de données dédiée à la fonction première du bâti (habitation en général), il a été décidé de faire paraître les descripteurs "atelier" dans la dénomination (et le titre) du dossier et "atelier de fabrication" dans les parties constituantes du site.

Finalement, l'opération se traduit par la réalisation de près de 780 dossiers, concernant en majorité ateliers, usines, maisons, etc. (78 %), mais aussi, pour plus de 170 d'entre eux (22 %), des objets (machines, montres, mouvements, etc.). Dans ce corpus, plus de 640 dossiers architecture et objets confondus (83 %) sont en rapport avec l'horlogerie. Parmi les autres, près de la moitié (47 %) traitent de fromageries et un cinquième (22 %) de scieries.
Cette masse documentaire conséquente, dont la constitution a conduit à s'affranchir du planning initial, est accessible à tous via internet. Elle est souvent bien illustrée grâce au soutien de collectionneurs et passionnés.

(Rédaction : octobre 2020)

Source(s) documentaire(s)

  • 50 J Syndicat des fabricants d’horlogerie de Besançon, 1789-1984
    50 J Syndicat des fabricants d’horlogerie de Besançon, 1789-1984
    Lieu de conservation : Archives départementales du Doubs, Besançon - Cote du document : 50 J
  • 3 P Délimitation des communes et cadastre ancien dit cadastre " napoléonien ", 1ère moitié 19e siècle
    3 P Délimitation des communes et cadastre ancien dit cadastre " napoléonien ", 1ère moitié 19e siècle
    Lieu de conservation : Archives départementales du Doubs, Besançon - Cote du document : 3 P
  • 7 S Hydraulique (régime des eaux, inondations, moulins et usines), 19e et 20e siècles
    7 S Hydraulique (régime des eaux, inondations, moulins et usines), 19e et 20e siècles
    Lieu de conservation : Archives départementales du Doubs, Besançon - Cote du document : 7 S
  • S provisoire Hydraulique (fonds des Ponts et Chaussées), 19e et 20e siècles
    S provisoire Hydraulique (fonds des Ponts et Chaussées), 19e et 20e siècles
    Lieu de conservation : Archives départementales du Doubs, Besançon - Cote du document : S provisoire
  • W Etablissements classés, 19e et 20e siècles
    W Etablissements classés, 19e et 20e siècles
    Lieu de conservation : Archives départementales du Doubs, Besançon - Cote du document : W
  • Les ébauches françaises (les calibres français), 1947
    Les ébauches françaises (les calibres français) / Documentation réunie par : Christian Johanet. - Paris : Revue française des Bijoutiers Horlogers, Pierre Johanet, s.d. [1947]. 100 p. : ill.; 21 x 27 cm.
    Lieu de conservation : Musée de l’Horlogerie, Morteau
  • Jobin, A.-F. La classification horlogère des calibres de montres et des fournitures d’horlogerie suisses. 3e vol., édition 1949
    Jobin, A.-F. La classification horlogère des calibres de montres et des fournitures d’horlogerie suisses. 3e vol., édition 1949. – Genève : La Classification horlogère suisse, 1949. 336 p. : tout en ill. ; 27,5 cm.1ère éd. en 1936, 2e en 1939. Reproduction grandeur nature des calibres de montres suisses, avec mention de la numérotation maison pour les pièces composant le mouvement.
    Lieu de conservation : Collection particulière : Jacques Donzé, Charquemont
  • Catalogue officiel des pièces d'origine pour le rhabillage des montres suisses, 1955
    Catalogue officiel des pièces d'origine pour le rhabillage des montres suisses. - Bienne : P. Ruch-Daulte, 1955. 2 t. en 1 vol. (classeur) : ill. ; 22 cm. (Les Fabricants suisses d'horlogerie)
  • Ebauches S.A. Désignation des marques de fabriques des maisons affiliées, 1949
    Ebauches S.A. Désignation des marques de fabriques des maisons affiliées, dessin imprimé, s.n., s.d. [1949]. Publié dans : Jobin, A.-F. La classification horlogère [...], 1949, p. [272 bis].
  • [Mouvements de différents calibres], 1949
    [Mouvements de différents calibres], dessin en couleur imprimé, par Lux, s.d. [1949]. Publié dans : Jobin, A.-F. La classification horlogère [...], 1949, pl. h.t. entre les p. 160 et 161.
  • 317. Pâturage au sommet des Echelles de la Mort, limite 19e siècle 20e siècle
    317. Pâturage au sommet des Echelles de la Mort, carte postale, par Ch. Simon, s.d. [limite 19e siècle 20e siècle, avant 1905]. Porte la date 13 mai 1905 au recto et au verso (tampon).
    Lieu de conservation : Collection particulière : Jacques Donzé, Charquemont
  • Prises de vues aériennes de l'IGN (20e siècle)
    Prises de vues aériennes de l'IGN (20e siècle). Consultables en ligne via le site du Géoportail (www.geoportail.gouv.fr)
  • Belmont, Henry-Louis. L'échappement à cylindre (1720-1950) : le Haut-Doubs, centre mondial au XIXe siècle, 1984
    Belmont, Henry-Louis. L'échappement à cylindre (1720-1950) : le Haut-Doubs, centre mondial au 19e siècle. - Besançon : Technicmédia, 1984. 328 p. : ill. ; 28 cm.
  • Briselance, Claude-Gilbert. L’horlogerie dans le val de Morteau au XIXe siècle (1789-1914), 1993
    Briselance, Claude-Gilbert. L’horlogerie dans le val de Morteau au 19e siècle (1789-1914). - 1993. 2 vol., XXXII-398 - III-420 f. : ill. ; 30 cm. Mém. maîtrise : histoire contemporaine : Besançon : 1993
  • Caboco, Laëtitia. Recensement du patrimoine horloger du Pays horloger, 2009-2010
    Caboco, Laëtitia. Recensement du patrimoine horloger du Pays horloger, 2009-2010.
    Lieu de conservation : Pays horloger, Le Bélieu
  • Chevalier, Michel. Tableau industriel de la Franche-Comté (1960-1961), 1961
    Chevalier, Michel. Tableau industriel de la Franche-Comté (1960-1961). - Paris : les Belles lettres, 1961. 101 p. : cartes ; 24 cm. (Annales littéraires de l’Université de Besançon. Cahiers de géographie de Besançon ; 9)
  • Courtieu, Jean (dir.). Dictionnaire des communes du département du Doubs, 1982-1987.
    Courtieu, Jean (dir.). Dictionnaire des communes du département du Doubs. - Besançon : Cêtre, 1982-1987. 6 t., 3566 p. : ill. ; 24 cm.
  • Daveau, Suzanne. Les régions frontalières de la montagne jurassienne. Étude de géographie humaine, 1959
    Daveau, Suzanne. Les régions frontalières de la montagne jurassienne. Étude de géographie humaine. - Lyon : Institut des Études rhodaniennes, 1959. 571 p. : ill. ; 24 cm. Th. : Lettres, 1957.
  • Le département du Doubs, 1923
    Le département du Doubs. - [S.l.] : [s.n.], 1923 : ill. N° spécial de « L’Illustration économique et financière », supplément du 4 août 1923
  • L'horlogerie, fille du temps : actes du cycle de conférences dans le massif du Jura, septembre 2016-juin 2017
    L'horlogerie, fille du temps : actes du cycle de conférences dans le massif du Jura, septembre 2016-juin 2017. - Besançon : Association française des amateurs d'horlogerie ancienne, 2017.
  • Poissenot, Aimé ; Abram, Luc ; Pourcelot, René. Histoire des pinces de Montécheroux, 2002
    Poissenot, Aimé ; Abram, Luc ; Pourcelot, René. Histoire des pinces de Montécheroux. - Nancray : Folklore comtois, 2002. 339 p. : ill. ; 24 cm.
  • Poupard, Laurent. Patrimoine industriel du Pays horloger, 2014
    Poupard, Laurent. Patrimoine industriel du Pays horloger / Région Franche-Comté, Service Inventaire et Patrimoine ; photogr. Sonia Dourlot, Jérôme Mongreville, Yves Sancey ; cartogr. Mathias Papigny. - Besançon : Région Franche-Comté, Direction de la Culture, Jeunesse, Sport, Vie associative, 2014. 11 p. : ill. ; 28 cm. Rapport d'étape de l'étude (voir en annexe)
  • Poupard, Laurent. Autour de la montre en Pays horloger. Doubs, 2019
    Poupard, Laurent. Autour de la montre en Pays horloger. Doubs / Région Bourgogne-Franche-Comté, Service Inventaire et Patrimoine ; photogr. Sonia Dourlot ; collab. Yves Sancey, Jérôme Mongreville. - Lyon : Lieux Dits, 2019. 128 p. : ill. ; 30 cm. (Images du patrimoine ; 308).
  • Pourchet, Gilbert. Le Haut-Doubs horloger, 1956
    Pourchet, Gilbert. Le Haut-Doubs horloger. - S.l. [Villers-le-Lac] : s.n., 1956. 54 p. dactyl. : ill. (carte, graphiques) , 27 cm.
  • Simonin, Michel. L'horlogerie au fil du temps et son évolution en Franche-Montagne, sur le plateau de Maîche, 2007
    Simonin, Michel. L'horlogerie au fil du temps et son évolution en Franche-Montagne, sur le plateau de Maîche. - Maîche : M. Simonin, 2007. 143 p. : ill. ; 30 cm.
  • Ternant, Evelyne. La dynamique longue d'un système productif localisé : l'industrie de la montre en Franche-Comté, 2004
    Ternant, Evelyne. La dynamique longue d'un système productif localisé : l'industrie de la montre en Franche-Comté / sous la dir. de Claude Courlet. - [S.l.] : [s.n.], [2004]. 2 vol. (874 p.) ; 30 cm. Th. doct. : Sci. soc. : Grenoble II, Université Pierre Mendès-France, Institut de Recherche économique sur la Production et le Développement, 2004.
  • Viennet, Jean-Pierre. Le pays des horlogers : trois siècles d'histoire franco-suisse, 2015
    Viennet, Jean-Pierre. Le pays des horlogers : trois siècles d'histoire franco-suisse. - Villers-le-Lac : Musée de la Montre, 2015. 271 p. : ill. ; 28 cm.
  • Vuillermot, Catherine. L'électrification dans le département du Doubs (1894-1946), 1985
    Vuillermot, Catherine. L'électrification dans le département du Doubs (1894-1946). - Besançon : Université de Franche-Comté, 1985. 182 f. : cartes. ; 30 cm. Mém. maîtrise : Hist. : Université de Franche-Comté : 1985
  • Vuillet, Bernard. Le val de Morteau et les Brenets en 1900, 1978
    Vuillet, Bernard. Le val de Morteau et les Brenets en 1900, d'après la collection de cartes postales de Georges Caille. - Les Gras : B. Vuillet, Villers-le-Lac : G. Caille, 1978. 294 p. : cartes postales ; 31 cm.
  • Vuillet, Bernard. Entre Doubs et Dessoubre. Tome II. Autour de Maîche et Belleherbe, 1990
    Vuillet, Bernard. Entre Doubs et Dessoubre. Tome II. Autour de Maîche et Belleherbe, d'après la collection de cartes postales de Georges Caille. - Les Gras : B. Vuillet, Villers-le-Lac : G. Caille, 1990. 231 p. : cartes postales ; 31 cm.
  • Vuillet, Bernard. Entre Doubs et Dessoubre. Tome III. Autour de Charquemont et Damprichard, 1991
    Vuillet, Bernard. Entre Doubs et Dessoubre. Tome III. Autour de Charquemont et Damprichard, d'après la collection de cartes postales de Georges Caille. - Les Gras : B. Vuillet, Villers-le-Lac : G. Caille, 1991. 243 p. : cartes postales ; 31 cm.
  • Bonnet Elisabeth (témoignage oral)
    Bonnet Elisabeth, fille d'André Dornier. Les Gras
  • Bonnet Henri (témoignage oral)
    Bonnet Henri, ancien dirigeant de la fabrique d'horlogerie Bonnet, à Morteau. Fournet-Luisans
  • Donzé Jacques (témoignage oral)
    Donzé Jacques, ancien horloger, historien de Charquemont
  • Droz Yves (témoignage oral)
    Droz Yves, collectionneur de pièces horlogères et fondateur du Musée de la Montre, Villers-le-Lac
  • Guyonneau Jean-Louis et Arlette (témoignage oral)
    Guyonneau Jean-Louis et Arlette, petite-fille de Charles Grandvoynnet. Pontarlier
  • Leiser Henri (témoignage oral)
    Leiser Henri, fils d'André Leiser et historien du val de Morteau. Morteau
  • Renaud-Bezot Jacques (témoignage oral)
    Renaud-Bezot Jacques, ancien dirigeant de la société horlogère du même nom. Villers-le-Lac
  • Simonin Michel (témoignage oral)
    Simonin Michel, ancien horloger, auteur de livres sur Maîche et l'horlogerie du Haut-Doubs. Maîche
  • Tisserand Roger (témoignage oral)
    Tisserand Roger, fils d'Arsène Tisserand, ancien agriculteur. Les Gras
  • Viennet Jean-Pierre (témoignage oral)
    Viennet Jean-Pierre, ancien horloger, fondateur de l'association HorloPassion
  • Vuez Jean-Claude (témoignage oral)
    Vuez Jean-Claude, descendant d'une famille d'horlogers, historien de la société Parrenin, Villers-le-Lac

Informations complémentaires


Canton de Maîche
Battenans-Varin
Belfays
Belleherbe
Les Bréseux
Cernay-l'Église
Charmauvillers
Charmoille
Charquemont
Cour-Saint-Maurice
Damprichard
Les Écorces
Ferrières-le-Lac
Fessevillers
Fournet-Blancheroche
Frambouhans
Goumois
La Grange
Maîche
Mancenans-Lizerne
Mont-de-Vougney
Orgeans-Blanchefontaine
Provenchère
Thiébouhans
Trévillers
Urtière
Vaucluse
Vauclusotte


Canton de Morteau
Les Combes
Les Fins
Grand'Combe-Châteleu
Les Gras
Montlebon
Morteau
Villers-le-Lac


Canton de Pont-de-Roide
Péseux
Rosières-sur-Barbèche


Canton du Russey
Le Barboux
Le Bélieu
Le Bizot
Bonnétage
La Bosse
Bretonvillers
Chamesey
La Chenalotte
Les Fontenelles
Grand'Combe-des-Bois
Laval-le-Prieuré
Longevelle-lès-Russey
Le Luhier
Le Mémont
Montbéliardot
Mont-de-Laval
Narbief
Noël-Cerneux
Plaimbois-du-Miroir
Rosureux
Le Russey
Saint-Julien-lès-Russey


Canton de Saint-Hippolyte
Bief
Burnevillers
Chamesol
Courtefontaine
Dampjoux
Fleurey
Froidevaux
Glère
Indevillers
Liebvillers
Montancy
Montandon
Montécheroux
Montjoie-le-Château
Les Plains-et-Grands-Essarts
Saint-Hippolyte
Soulce-Cernay
Les Terres-de-Chaux
Valoreille
Vaufrey

Canton de Maîche
Battenans-Varin
Belfays
Belleherbe
Les Bréseux
Cernay-l'Église
Charmauvillers
Charmoille
Charquemont
Cour-Saint-Maurice
Damprichard
Les Écorces
Ferrières-le-Lac
Fessevillers
Fournet-Blancheroche
Frambouhans
Goumois
La Grange
Maîche
Mancenans-Lizerne
Mont-de-Vougney
Orgeans-Blanchefontaine
Provenchère
Thiébouhans
Trévillers
Urtière
Vaucluse
Vauclusotte

Canton de Montbenoît
La Longeville
Ville-du-Pont

Canton de Morteau
Les Combes
Les Fins
Grand'Combe-Châteleu
Les Gras
Montlebon
Morteau
Villers-le-Lac

Canton de Pierrefontaine-les-Varans
Consolation-Maisonnettes
Domprel
Flangebouche
Fournets-Luisans
Fuans
Germéfontaine
Guyans-Vennes
Landresse
Laviron
Loray
Orchamps-Vennes
Pierrefontaine-les-Varans
Plaimbois-Vennes
La Sommette
Vennes

Canton de Pont-de-Roide
Péseux
Rosières-sur-Barbèche

Canton du Russey
Le Barboux
Le Bélieu
Le Bizot
Bonnétage
La Bosse
Bretonvillers
Chamesey
La Chenalotte
Les Fontenelles
Grand'Combe-des-Bois
Laval-le-Prieuré
Longevelle-lès-Russey
Le Luhier
Le Mémont
Montbéliardot
Mont-de-Laval
Narbief
Noël-Cerneux
Plaimbois-du-Miroir
Rosureux
Le Russey
Saint-Julien-lès-Russey

Canton de Saint-Hippolyte
Bief
Burnevillers
Chamesol
Courtefontaine
Dampjoux
Fleurey
Froidevaux
Glère
Indevillers
Liebvillers
Montancy
Montandon
Montécheroux
Montjoie-le-Château
Les Plains-et-Grands-Essarts
Saint-Hippolyte
Soulce-Cernay
Les Terres-de-Chaux
Valoreille
Vaufrey

Document aussi disponible en version PDF


L’inventaire du patrimoine industriel du Pays horloger

Patrimoine industriel rime spontanément dans le Doubs avec Arc-et-Senans ou Peugeot. Dans le Haut-Doubs, c’est l’image de la ferme-atelier qui s’impose mais il est plus rare que soient évoquées les fromageries ou les scieries qui, pourtant, ponctuent l’ensemble de la zone. Sans même parler de ces ateliers d’horlogerie autrefois présents dans la plupart des habitations de certains villages. Alors que recouvre cette expression « patrimoine industriel » ?
L’étude en cours dans le Pays horloger va apporter quelques éléments de réponse à cette question. Son but premier : réaliser un inventaire de ce type de patrimoine. Autrement dit essayer d’ancrer, de rattacher à un lieu particulier ces mentions volatiles que sont, par exemple, les noms d’horlogers ou de sociétés véhiculés par la mémoire collective. Ce document vous propose un survol très partiel des premiers résultats obtenus.


1. Le Pays horloger
Structure administrative récente fondée en 1995, le Pays horloger s’est, comme son nom l’indique, constitué plus autour d’un sentiment identitaire que d’une évidence géographique. Sentiment fort qui s’est cristallisé autour d’une industrie phare : l’horlogerie.

Localisation
Formant le flanc oriental du département, le Pays horloger recouvre principalement le second plateau entre les vallées du Doubs et du Dessoubre, avec une zone plus mouvementée au sud-ouest (zone du Mont Châteleu, des Gras et des Combes) et une partie du premier plateau au nord-ouest autour de Belleherbe. Le paysage est essentiellement rural avec une agriculture organisée autour de la production laitière et – mais c’est bien moins vrai de nos jours – de l’élevage du cheval comtois. Ces espaces, où la forêt le dispute aux pâtures, sont ponctués de quelques villes : les chefs-lieux de canton que sont Morteau, Le Russey, Maîche et Saint-Hippolyte, mais aussi des bourgs tels Villers-le-Lac, Charquemont et Damprichard.Le périmètre du Pays (validé en 2001) concerne les quatre cantons mentionnés et, à la marge (deux communes), celui de Pont-de-Roide, soit 78 communes pour 760 km2 et 40 500 habitants environ.

Le Pays horloger est né l’année même de la promulgation de la Loi d’orientation pour l’aménagement et le développement du territoire du 4 février 1995. Naissance précoce favorisée par l’existence de structures intercommunales, par sa frontière avec la Suisse et par le maintien d’une économie traditionnelle. Il est géré par un syndicat mixte, entité juridique créée en 1996 et qui réunit aujourd’hui cinq communautés de communes : celle du Val de Morteau (novembre 2000, succédant à un district fondé en 1973), du Pays de Maîche (janvier 2010, issue d’une communauté créée le 1er janvier 2000), du Plateau du Russey (décembre 2001), de Saint-Hippolyte (janvier 2002) et Entre Dessoubre et Barbèche (décembre 2002).


Repères historiques
Après un 17e siècle éprouvant – marqué par la guerre de Dix Ans (1635-1644), l’annexion par la France (en 1678), la peste et la famine –, qui voit la disparition des deux tiers de la population, le 18e est le siècle de la reconstruction, du repeuplement (par des Savoyards et des Suisses) et d’un changement profond de la société initié par la Révolution. Le 19e siècle se caractérise par un essor économique important – qui voit l’industrie horlogère s’implanter durablement (en sous-traitance pour la Suisse) et l’agriculture se spécialiser dans l’élevage – et par la progression de la laïcité. Conflits mondiaux et crises marquent le 20e ; l’horlogerie, devenue triomphante, s’étiole à partir des années 1970 face au changement technologique majeur apporté par le quartz et à la mondialisation, et les emplois se déplacent en Suisse ; l’industrie laitière se maintient grâce au développement d’une filière fromagère axée sur la qualité (comté).


2. Une industrie diversifiée
Une statistique de 1850 donne un aperçu du paysage industriel passé, sans s’attacher à la taille des établissements recensés. Elle n’en répertorie pas moins de 423 dans les cantons de Maîche, Morteau, Le Russey et Saint-Hippolyte : 236 « moulins, ribes, scieries, huileries, machines à battre », 116 « fabriques et ateliers divers d’horlogerie, instruments de précision », 43 « forges, martinets, forges de grosses œuvres, de grand et petit volume », 14 tuileries et briqueteries, 11 tanneries et 3 brasseries. Les fromageries ne sont pas prises en compte dans ce document, qui montre une structure traditionnelle des activités (privilégiant ressources naturelles et proximité) et atteste de l’abondance de l’énergie hydraulique, de la vocation métallurgique de la zone et, déjà, de l’importance de l’horlogerie.


Industrie / Canton

Maîche

Morteau

Le_Russey

Saint-Hippolyte

Total

Moulins, ribes, scieries, huileries, machines à battre

67

62

49

58

236

Fabriques et ateliers divers d’horlogerie, instruments de précision

26

24

55

11

116

Forges, martinets, forges de grosses œuvres, de grand et petit volume

10

11

13

9

43

Tuileries et briqueteries

5

2

2

5

14

Tanneries

4

3

2

2

11

Brasseries

1

0

0

2

3

Total

113

102

121

87

423

Une source d’énergie abondante : l’eau
La pression démographique du 19e siècle a conduit à exploiter le moindre filet d’eau pour installer des roues hydrauliques. A l’image de ce site très modeste à Frambouhans en 1852 : « Scierie à 1 lame et 1 roue. Ruisseau : eaux de marais. Propriétaire ou exploitant : MM Monnot frères. Observation : chômage de 10 mois ». A l’opposé, Saint-Hippolyte compte 9 établissements dynamiques – réunissant 5 scieries, 3 moulins, 3 ribes (meules verticales) à chanvre et 2 taillanderies (totalisant 6 martinets) – dont seul chôme parfois celui sur le ruisseau de Mouillevers.

A la fin de ce siècle, l’abondance des eaux du Doubs et du Dessoubre constitue une manne pour les sociétés électriques. La première sur place est la Société des Forces électriques de la Goule, entreprise suisse dont la centrale sur le Doubs entre en activité en 1895 et qui alimente dès la fin de cette année l’usine Bourgeois, de Damprichard, puis l’année suivante une partie du plateau (la ville de Morteau est aussi desservie à cette date). Côté français, la première centrale hydroélectrique, également sur le Doubs, est celle du Refrain inaugurée en 1909. Une autre, bien plus modeste, est ouverte sur le Dessoubre à Battenans-Varin.
Les installations se multiplient après la première guerre mondiale : centrales à Liebvillers en 1929, à Vaufrey en 1949 puis au Châtelot en 1953 (site franco-suisse). Elles contribuent à l’achèvement de l’électrification totale du département au début des années 1930 (40 % des communes l’étaient dès 1914 alors que la moyenne nationale n’était que de 18 %).

Un matériau tout aussi abondant : le bois
Le nombre de scieries attestées au fil du temps dans le Pays horloger n’a rien d’étonnant : le boisement est important, les besoins également notamment pour la construction des vastes fermes traditionnelles. Les scies constituent fréquemment un équipement d’appoint des moulins mais de véritables scieries spécialisées ont vu le jour. Bien peu ont résisté à la concurrence internationale qui, après la seconde guerre mondiale, s’est traduite par une importante concentration. Par exemple, ces dernières années ont vu la fermeture de celles de Cour-Saint-Maurice, des Fins, du Russey, etc., mais celles de Maîche, Damprichard et Villers-le-Lac tirent toujours leur épingle du jeu. A l’autre extrémité du Pays, l’une des fabriques de chaises de Charmoille a donné naissance à la fabrique de meubles Bernardot, transférée sur le Dessoubre dans la commune de Vauclusotte.

Spécialisation laitière et industrie fromagère
Issue du cheptel des Mennonites de la région de Montbéliard, la race Montbéliarde gagne ses lettres de noblesse grâce à des éleveurs tel Joseph Mamet, des Fins. Avec l’amélioration des façons culturales, elle contribue au développement de l’industrie laitière dans un département berceau des fruitières (Levier, 13e siècle) et doté d’une école de fromagerie (Mamirolle, 1888). Les fromageries s’installent au 19e siècle dans des bâtiments adaptés, dont plusieurs peuvent subsister dans la même commune comme à Damprichard où, à côté de la fromagerie actuelle (1927), sont conservées celle rebâtie à la Seignotte (1968) et celle établie par Pronk dans l’ancienne scierie Hintzy (1964). Si les concentrations des dernières décennies ont réduit leur nombre, elles ont augmenté leur taille d’où de fréquentes modifications ou reconstructions des locaux. Dans ce même canton de Maîche, par exemple, fonctionnent actuellement celles de Belleherbe (1928), Charmauvillers (1924 et 1963), Charquemont (1947 et 1989), Damprichard et Trévillers (1904 et 1954).

Un tissu industriel varié
Certaines industries ont totalement disparu ou laissé peu de traces lisibles (tuileries, dinanderies, taillanderies, verreries…) ; d’autres ont perduré et de nouvelles sont apparues. Ainsi, le textile reste marginal avec Frambouhans (Bonneterie franc-comtoise, 1920) mais l’agro-alimentaire est brillamment représenté à Morteau avec la chocolaterie (Klaus, 1896) et la brasserie (Chopard, 1833).
Le travail des métaux reste une spécificité : fonderie de cloches (Obertino, succédant à Bournez signalé dès 1780), fabrique de machines à coudre et vélos (Panneton, 1884) ou de pièces détachées pour l’automobile (Fabi, 1948) à Morteau, fabrique de matériel de fromagerie et chaudières (Thiébaud, 1913) à Trévillers, de graisseurs et chignoles (Secim, 1920) à Damprichard, de couverts de table (Vermot-Gaud, 1933) à Montlebon, etc. L’influence de l’horlogerie se fait sentir : outillage à main et petites machines pour horlogers sortent de Montécheroux (activité signalée dès le 18e siècle avec une première usine au village en 1850) et des Gras (activité introduite en 1842, 36 entreprises en 1923) ; décolletage et emboutissage constituent une alternative aux difficultés de la filière.


3. Une industrie dominée par l’horlogerie

Mouvement général de l’horlogerie
L’industrie phare du Pays horloger reste – bien évidemment – l’horlogerie. La petite horlogerie (les montres) s’est installée au 18e siècle dans la Franche Montagne (région de Maîche, Le Russey et Morteau), à cheval sur la France et la Suisse. Les conditions y sont favorables : tradition métallurgique, hiver long imposant au paysan la pratique d’une activité complémentaire, etc. Fabrication « en parties brisées », elle s’épanouit au sein du système de l’établissage qui voit chaque horloger réaliser à domicile une passe particulière ou un type précis de pièce, le montage du produit final étant assuré par l’établisseur installé en ville.

Lorsque cette industrie prend son essor dans la seconde moitié du 19e siècle, le paysan-horloger devient horloger-paysan tandis que s’étoffe le milieu ouvrier des bourgs, où se créent ateliers et usines. Le val de Morteau, particulièrement dynamique avec son école d’horlogerie (1836-1850), attire la main-d’œuvre helvétique (535 Suisses viennent y travailler en 1857). Les Français fournissent à la Suisse les échappements à cylindre, dont ils ont un quasi-monopole (1840-1950). La fermeture de la frontière dans les années 1890 les conduit cependant à fabriquer des montres entières, écoulées sur un vaste marché intérieur englobant l’empire colonial.

Le nombre des sociétés horlogères ne cesse d’augmenter, connaissant une véritable explosion après la deuxième guerre mondiale, jusqu’aux années 1970 où ce mouvement se brise contre la rupture technologique des mouvements à quartz. De concentrations en fermetures, la filière se vide alors de sa substance et bien peu d’entreprises subsistent aujourd’hui. Les emplois horlogers sont dorénavant majoritairement localisés en Suisse (dans le canton de Neuchâtel, la moitié des postes est occupée par des frontaliers).

Une grande diversité d’entreprises
L’industrie horlogère regroupe tout un ensemble de métiers et de produits, reflétant le nombre et la variété des composants d’une montre. Bref survol de ce domaine, sans souci de l’époque ni d’une quelconque exhaustivité.
L’une des premières fabriques d’ébauches était installée à Fournet-Blancheroche (Joubert à la Rasse, 1857) puis ces pièces sont sorties d’usines de Maîche (Jeambrun, Technic Ebauches), Charquemont (Guillaume, Frésard), Morteau (Girardet), Villers-le-Lac (Cupillard, Parrenin, Binétruy/Isa France). Les boîtes sont une spécialité de Damprichard (Bourgeois, SBBM Burdet – 600 personnes en 1974 –, Racine, Silvant) mais viennent aussi de Charmauvillers (Nappey, Bouchet), Frambouhans (Mydor Déco), Le Russey (Cometor) ou Morteau (Frainier – 200 à 300 personnes). Les cadrans sont faits à Morteau (Morteau Cadrans) ou Charquemont (Haenni), les aiguilles à Morteau (La Pratique), les bracelets à Maîche (Froidevaux, Super’Or), Damprichard (Burdet, Petermann, Munnier), Charquemont (Famap), etc. Les mouvements ou leurs composants (assortiments à cylindre ou à ancre, rouages, balanciers...) sont réalisés dans l’ensemble de la zone, aussi bien dans des petits ateliers familiaux que dans de grandes usines. Les rubis sont travaillés à Charquemont (Rubis Précis) et Maîche (Cheval, Sandoz, Elvé), le traitement de surface des pièces (galvanoplastie) pratiqué un peu partout.

Non moins foisonnant est le milieu des fabricants de montres. D’autant que chaque fabricant peut décider de produire – suivant l’époque, les opportunités, la demande… – composants ou montres entières, passant d’une activité à l’autre, pratiquant le rhabillage, le remontage en sous-traitance, etc. Et ce seul, en famille, avec quelques ouvriers ou dans une structure plus importante, à la tête de dizaines voire de centaines de personnes (à Morteau, Mercier en emploie près de 300 au début des années 1960, Cattin 270 en 1980). Ainsi, par exemple, 46 marques de montre sont répertoriées dans le secteur de Maîche en 1952 et, en 1960, la seule ville de Morteau compte 53 fabricants et Villers-le-Lac 40 !

Quel patrimoine industriel horloger ?
Quel type de patrimoine bâti fabrication, remontage et/ou négoce des montres ont-ils généré dans le Pays horloger ? Trois cas de figure se dessinent : l’atelier est installé dans tout ou partie d’une pièce dans une ferme ou une maison ; il en occupe un niveau ou dispose d’un bâtiment dédié ; il est intégré dans une véritable usine. Si ce dernier cas ne pose pas de problème d’identification, il n’en est pas de même des deux premiers. En effet comment repérer la présence d’un atelier à la simple lecture de la façade d’un bâtiment, sachant que cet atelier a pu avoir une durée de vie brève ou être fermé depuis des décennies ?
Pour une activité minutieuse avec de petits composants, la gestion de la lumière apporte un premier indice. Elle se manifeste par la présence de baies spécifiques : fenêtres horlogères (jumelées et d’un module standard), appelées localement « pile double », ou fenêtres multiples (plus de deux fenêtres jumelées) dites « fenestrage ». Indice seulement car il s’avère qu’au fil du temps, cet élément architectural est devenu un marqueur de l’implantation géographique !

Une validation par un autre biais est donc indispensable : archives, témoignage oral, carte postale… Ainsi à Charquemont, un nouveau quartier s’est constitué autour de la gare du tacot (ligne Morteau-Maîche ouverte en 1905), avec création de la rue de la Gare et de la Rue Neuve. Dans cette dernière, une usine est immédiatement identifiable au n° 4 (Struchen) et un atelier au n° 7 (Wasner-Ruffier) mais, sans information complémentaire, comment savoir que chacun des 13 bâtiments qui bordent cette rue a abrité un atelier ou un logement patronal ? D’où l’importance des correspondants locaux (Jacques Donzé à Charquemont, Michel Simonin à Maîche, Henri Leiser et Jean-Pierre Viennet à Morteau…).

Une étude adaptée pour l’industrie horlogère
Un premier sondage, effectué à l’été 2012 sur les cinq communes du Pays horloger principalement concernées par cette industrie (Morteau, Villers-le-Lac, Maîche, Charquemont et Damprichard) avait révélé un potentiel de 500 sites ! D’où la décision de restreindre le corpus en demeurant exhaustif pour les usines et ateliers clairement identifiables, et en étant sélectif dans le cas des fermes-ateliers ou des maisons-ateliers. La précision des renseignements fournis sur Charquemont par M Donzé ont néanmoins conduit à pousser l’étude sur ce village, sur lequel une centaine de dossiers va être établie. Chacun comporte des informations d’identification, de localisation, historiques, descriptives et documentaires, accompagnées d’une illustration photographique et graphique. Ils seront accessibles via internet et le portail patrimonial de la région Franche-Comté.
Autre décision : l’horlogerie étant le critère fondateur du Pays horloger, prendre en compte tout ce qui concerne ce domaine, y compris les usines et les ateliers les plus récents.


4. Point d’étape et perspectives

Premiers résultats
L’inventaire du patrimoine industriel, qui a réellement démarré début 2012, a intégré une première phase de bibliographie permettant de documenter plus de 550 sites et entreprises. Une seconde phase a pris en compte les barrages et centrales hydroélectriques EDF du Groupement d’Usines Doubs, dont cinq relèvent de notre zone.
La troisième phase – en cours – allie repérage sur le terrain, campagne photographique et rédaction (avec recours aux archives). Au 31 juillet 2014, 238 dossiers sont ouverts dont 122 saisis, concernant essentiellement le canton de Maîche. La richesse du domaine imposera d’ailleurs de réviser le planning initial.
Le principal mérite de cette opération – bien évidemment perfectible et amendable – sera d’offrir un socle stable pour de nouvelles études ou des exploitations variées, liées à l’aménagement du territoire, à la création du futur PNR, etc.

Perspectives d’utilisation
L’inventaire va en effet directement alimenter un projet d’importance porté par le Pays horloger et la Région Franche-Comté : la création d’un parc naturel régional (PNR) transfrontalier, autour du Doubs franco-suisse, reposant en fait sur la coopération de deux PNR. Le premier existe depuis 2013 : il s’agit du PNR Doubs, qui regroupe 16 communes suisses. Le second en France est en cours de définition et pourrait réunir jusqu’à 95 communes. Là encore, l’horlogerie devrait constituer l’un des axes forts de la nouvelle structure, encore alimenté par le travail ethnologique en cours sur la mémoire horlogère.
D’autres exploitations seront possibles, aussi bien dans le domaine économique que patrimonial (en lien avec la réorganisation des musées envisagée dans le cadre du contrat de station du val de Morteau, par exemple).

Communauté de communes du Pays de Maîche
Battenans-Varin
Belfays
Bief
Les Bréseux
Burnevillers
Cernay-l'Église
Chamesol
Charmauvillers
Charquemont
Cour-Saint-Maurice
Courtefontaine
Dampjoux
Damprichard
Les Écorces
Ferrières-le-Lac
Fessevillers
Fleurey
Fournet-Blancheroche
Frambouhans
Glère
Goumois
Indevillers
Liebvillers
Maîche
Mancenans-Lizerne
Montancy
Montadon
Mont-de-Vougney
Montécheroux
Montjoie-le-Château
Orgeans-Blanchefontaine
Les Plains-et-Grands-Essarts
Rosureux
Saint-Hippolyte
Soulce-Cernay
Les Terres-de-Chaux
Thiébouhans
Trévillers
Urtière
Valoreille
Vaucluse
Vauclusotte
Vaufrey

Communauté de communes du Plateau du Russey
Le Barboux
Le Bizot
Bonnétage
La Bosse
La Chenalotte
Les Fontenelles
Grand'Combe-des-Bois
Laval-le-Prieuré
Le Luhier
Le Mémont
Montbéliardot
Mont-de-Laval
Narbief
Noël-Cerneux
Plaimbois-du-Miroir
Le Russey
Saint-Julien-lès-Russey

Communauté de communes du Val de Morteau
Le Bélieu
Les Combes
Les Fins
Grand'Combe-Châteleu
Les Gras
Montlebon
Morteau
Villers-le-Lac

Boyer, Jacques. Les rouages d'une montre moderne. Le Mois littéraire et pittoresque, n° 139, juillet 1910, p. 86-100 : ill.

Table des fabricants d'ébauches françaises en 1947, extraite de : Les ébauches françaises (les calibres français) / Documentation réunie par : Christian Johanet. - Paris : Revue française des Bijoutiers Horlogers, Pierre Johanet, s.d. [1947], p. 3. (Musée de l'Horlogerie, Morteau)

Table des ponts, sautoirs, bascules et tirettes des ébauches françaises (et marques déposées des fabricants) en 1947, extraites de : Les ébauches françaises (les calibres français) / Documentation réunie par : Christian Johanet. - Paris : Revue française des Bijoutiers Horlogers, Pierre Johanet, s.d. [1947], p. 5-6 : ill. (Musée de l'Horlogerie, Morteau)
Thématiques :
  • patrimoine industriel du Doubs
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