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ENSEMBLE DU GÉNIE CIVIL (LES OUVRAGES FERROVIAIRES SITUÉS SUR LA COMMUNE DE FAVERNEY)

70 - Faverney

  • Dossier IA70000545 réalisé en 2012 revu en 2014
  • Auteur(s) : Carole Josso, Liliane Hamelin
20127000566NUC4A © Région Bourgogne-Franche-Comté, Inventaire du patrimoine

Historique


Le territoire de la commune de Faverney est traversé par trois lignes ferroviaires : la ligne Paris-Mulhouse encore active, celle de Nancy-Gray fermée en 1991 et le chemin de fer vicinal d'Equevilley à Vauvillers ouvert en 1911 et fermé en 1938. Le noeud ferroviaire de ces trois lignes se situe au hameau de Port-d'Atelier.

La création d'une ligne Paris-Mulhouse est envisagée dès 1845 et sa construction est confiée à la Compagnie des Chemins de Fer de l'Est. Le tracé de cette ligne (n° 40) est validé en 1854, celui de la section Langres-Vesoul (qui traverse le territoire de Faverney) en 1855. Une gare est prévue dans la commune, que l'ingénieur Larivière propose le 15 octobre 1854 d'établir à Port-d'Atelier. En premier lieu, le site permet un terrassement assez haut pour la création de l'établissement, alors que partout ailleurs le terrain est tourbeux et inondable. En second lieu, Port-d'Atelier se trouve à l'intersection de chemins par lesquels transitent les produits de l'industrie et du commerce des deux rives de la Saône et de la Lanterne. Par ailleurs, il est également prévu que ce soit là qu'une ligne Nancy-Gray, encore à l'étude, se raccorde à la ligne Paris-Mulhouse. Le tronçon Langres-Vesoul est mis en service le 22 février 1858 et la ligne elle-même le 16 avril suivant. Des trains prestigieux l'empruntent régulièrement comme, par exemple, l'Arlberg-Orient-Express de 1930 à 1962 entre Londres et Budapest (avec embranchement vers Bucarest ou Athènes), l'Arbalète de 1957 à 1979 entre Paris et Zurich et le "train des Eaux" en 1966 entre Epinal et Nice.
Une pompe à vapeur est installée en 1858 au sud-est du site, près d'un pont du chemin de fer, pour alimenter avec l'eau de la Noue Rouge et de ses étangs les réservoirs nécessaires au fonctionnement des locomotives à vapeur. Un bâtiment en rez-de-chaussée accueille le local technique de la pompe et un logement de trois pièces avec comble et cave. Les locomotives à vapeur, à l'origine de nombreux incendies de forêt (quatorze sont déclarés entre 1865 et 1938), sont remplacées progressivement et jusqu'au début des années 1960 par des machines diesel.

La concession de la ligne Nancy-Gray, reliant ces deux villes via Epinal, Aillevillers, Faverney et Vesoul, est accordée le 17 août 1853. Entre Faverney et Vesoul, cette ligne emprunte celle de Paris à Mulhouse grâce à un double raccordement à Port-d'Atelier. Si le conseil municipal demande le 9 mai 1858 l'ouverture d'une gare à Faverney, les travaux de la section de ce village à Aillevillers sont ajournés pour des raisons financières par la Compagnie des Chemins de Fer de l'Est. Les élus locaux craignent de graves troubles sociaux, les communes étant envahies d'ouvriers endettés et affamés. Le préfet écrit, le 10 juin 1858, aux ministres de l'Intérieur et des Travaux publics que "le chantier étant fort rapproché de Plombières où l'Empereur doit se rendre dans quelques jours, il pourrait y avoir un inconvénient à laisser ainsi sans travail un grand nombre d'ouvriers [...] d'un autre côté, l'Empereur [...] désire [...] voir promptement achevé le tronçon [...] car il doit devenir, avec celui de Mulhouse, la ligne directe de Paris à Plombières". L'Etat alors d'apporter une aide financière à la compagnie et les travaux reprennent. Le tronçon Port-d'Atelier - Aillevillers est ouvert en 1860 et la ligne Nancy-Gray est inaugurée en 1863.

Le site de Port-d'Atelier prend de l'ampleur à la suite de l'autorisation accordée, le 10 juillet 1868, par le préfet d'y établir un atelier temporaire de préparation de traverses en vases clos au moyen d'huile lourde de goudron, procédé appelé créosotage. En 1910, un chantier permanent est ouvert à proximité de la gare sur la commune d'Amance. Rapidement, il devient l'un des plus importants chantiers de créosotage en France et, en 1938, il produit et expédie 150 000 traverses dans 750 wagons à destination du sud et de l'est de la France. Il fermera en 1979.
Les lignes Paris-Mulhouse et Nancy-Gray, dont l’équipement est surdimensionné (double voie), représentent un enjeu militaire important : elles doivent permettre un transport rapide des troupes vers la frontière allemande. Outre une communication difficile entre la Compagnie de l’Est et le ministère de la Guerre, la défaite de 1870 met en évidence l’insuffisance des réseaux. Les gares sont notamment mal équipées pour le déchargement des hommes et du matériel. Un quai découvert de 202 m est donc construit en 1874 à Port-d’Atelier sur la voie XIV. Il est porté à 615 m en 1910 pour permettre le stationnement de trains de 75 véhicules. Ce quai est notamment utilisé lors de la seconde guerre mondiale par les permissionnaires en transit qui rejoignent, à quelques mètres de là, sous le couvert de la forêt, le Centre de Rassemblement des Permissionnaires, baptisé "Fanfan la Tulipe". Ce camp, composé d’une trentaine de baraquements en bois et de quatre en béton, est destiné à accueillir et restaurer les hommes revenus du front. De nombreux vestiges, imbriqués dans un entrelacs de tranchées, subsistent : cantine, latrines, dépôt de munitions, pont. Selon une tradition locale, les officiers logeaient dans la maison dite la Caserne. A plusieurs centaines de mètres, en direction de Faverney, on observe une voie de 6 m de large, perpendiculaire à un radier maçonné de 2 m de large sur 25 m de long. Elle rejoint plus loin, en direction de Port-d’Atelier, une zone où s’alignent six ponceaux sur lesquels passent six voies de 6 ou 12 m de large. Ces vestiges correspondraient à ce qu'envisage la Compagnie de l'Est en achetant, en 1892, des parcelles du bois des Balières pour "l’amélioration des conditions des garages des trains au raccordement militaire de Port-d’Atelier". Ces restes semblent être ceux de constructions commandées après la défaite française de 1870, en préparation d'un conflit futur.

Un chemin de fer d’intérêt local reliant les communes rurales et l’industrie au réseau ferroviaire de la Compagnie de l’Est est envisagé en 1873. La compagnie des chemins de fer vicinaux (CFV) souhaite dès 1888 créer, sur une ligne Vesoul-Luxeuil, un embranchement à Equevilley pour Vauvillers via Faverney. La maturation du projet est laborieuse, jusqu’à l’ouverture de la ligne en 1911. La voie se détourne finalement de Faverney pour passer à quelques centaines de mètres du village, de l’autre côté du pont des Bénédictins (lieu-dit le Bout du Pont). Elle se raccorde au réseau ferroviaire de l’Est à Port-d’Atelier. Entre ces deux écarts, elle enjambe la ligne Nancy-Gray à l'aide d'un pont à deux arches : la première large de 11 m au-dessus du chemin de défruitement et la seconde large de 13,80 m au-dessus de la voie ferrée. D'autres ponts sont nécessaires : un de 4 m au-dessus d’un ruisseau et un autre de 15,20 m sur la Noue Rouge. Ce dernier, détruit par une crue en 1910, est reconstruit en 1912. Les longues tractations pour la création d’une gare à l’extrémité sud du pont des Bénédictins n’aboutissent qu’en 1913. Les travaux, confiés à Eugène Laurent, entrepreneur à Mersuay, sont terminés en 1914.

Déficitaire comme toutes les voies du CFV, la ligne du chemin de fer d’intérêt local est fermée dès 1938. Elle est déposée immédiatement après et la gare démolie par la suite. Seul le tracé de la voie subsiste sur la commune, avec les culées des ponts au croisement de l’ancienne ligne Nancy-Gray et sur les ruisseaux.
Passée à voie unique en 1974, la ligne Nancy-Gray ferme aux trafics voyageurs et marchandises en 1991, victime de la faiblesse de son potentiel économique et de la fermeture du chantier de créosotage (sur la commune d'Amance) en 1979. Sa gare, transformée en maison, a été conservée de même que le pont sur la Lanterne. Cette ligne a été le lieu d'un accident important (42 morts et 33 blessés) dans la nuit du 18 février 1949, à 1500 m au sud-est de la gare de Port-d'Atelier (au PK 123.090). Une plaque commémorative a été apposée en souvenir des victimes à l'entrée de l'église du Sacré-Coeur.
Seule demeure donc en activité la ligne Paris-Mulhouse. Son tracé sinueux et l'absence de villes importantes desservies en ont retardé la modernisation si bien que les lignes Paris-Strasbourg et Paris-Dijon-Belfort, électrifiées, ont pu capter le trafic "grandes lignes". Si la gare de Port-d'Atelier subsiste, elle a été fermée au trafic des voyageurs au début des années 2010. Depuis 2007, son personnel est réduit à un agent-circulation, qui assure quotidiennement le cantonnement de la vingtaine de trains de passagers, de marchandises et de machines d'entretien qui traversent le site. Quelques entreprises locales privilégient encore ce mode de transport pour leur production, tels PSA qui achemine des pièces détachées entre son établissement de Vesoul et Kalouga en Russie et la tréfilerie de Conflandey qui déplace 1 000 tonnes de fil métallique par semaine en un seul train. Certains bâtiments et diverses installations ont été démolis (comme en 1982 la maison de garde-barrière située au nord, au long de la R.D. 7), d'autres sont désaffectés (station de pompage, citernes et châteaux d'eau, etc.).
Période(s)
Principale :
  • 3e quart 19e siècle
  • 1er quart 20e siècle
Secondaire :
  • 4e quart 19e siècle

Description


Les bâtiments ont généralement des murs en moellons de calcaire enduits et un toit à longs pans, pignons couverts et tuiles mécaniques. Les deux maisons de garde-barrière sont établies au long de la route d'Amoncourt (R.D. 20). Celle au sud (cadastrée 1996 F 868) est relativement bien conservée et se compose de deux corps de bâtiments perpendiculaires, l'un en rez-de-chaussée et l'autre à un étage carré. Elle comporte à l'arrière une citerne métallique sur socle en maçonnerie tenant lieu de château d'eau. Celle au nord (1996 F 431-432) a été très transformée. La station de pompage (vandalisée) est en rez-de-chaussée, avec un comble à surcroît. Le magasin à munitions est en béton armé, coiffé d'une terrasse dans le même matériau.
Murs :
  • calcaire
  • béton
  • moellon
  • béton armé
  • enduit
Toit :
  • tuile mécanique
  • béton en couverture
Etages :
  • en rez-de-chaussée
  • comble à surcroît

Source(s) documentaire(s)

  • 228 Edépôt 108. Plan de Faverney, 7 févier 1884
    228 Edépôt 108. Plan de Faverney, 7 février 1884.
    Lieu de conservation : Archives départementales de la Haute-Saône, Vesoul - Cote du document : 228 Edépôt 108
  • 175 S 3. Chemin de fer d'intérêt général. Chemin de fer de l'Est. Ligne Paris-Mulhouse. Stations et gares. Emplacement et travaux divers, 1855-1914
    175 S 3. Chemin de fer d'intérêt général. Chemin de fer de l'Est. Ligne Paris-Mulhouse. Stations et gares. Emplacement et travaux divers, 1855-1914
    Lieu de conservation : Archives départementales de la Haute-Saône, Vesoul - Cote du document : 175 S 3
  • 177 S 2. Chemin de fer d'intérêt général. Chemin de fer de l'Est. Ligne Nancy à Gray. Stations et gares, 1858-1863
    177 S 2. Chemin de fer d'intérêt général. Chemin de fer de l'Est. Ligne Nancy à Gray. Stations et gares, 1858-1863
    Lieu de conservation : Archives départementales de la Haute-Saône, Vesoul - Cote du document : 177 S 2
  • 177 S 3. Voies ferrées d'intérêt local. Ligne de Vesoul à Vauvillers. Construction. Stations, emplacements, 1907-1913
    177 S 3. Voies ferrées d'intérêt local. Ligne de Vesoul à Vauvillers. Construction. Stations, emplacements, 1907-1913
    Lieu de conservation : Archives départementales de la Haute-Saône, Vesoul - Cote du document : 177 S 3
  • 223 S 1-5. Voies ferrées d'intérêt local. Ligne de Vesoul à Vauvillers. Construction, 1903-1926
    223 S 1-5. Voies ferrées d'intérêt local. Ligne de Vesoul à Vauvillers. Construction, 1903-1926
    Lieu de conservation : Archives départementales de la Haute-Saône, Vesoul - Cote du document : 223 S 1-5
  • 224 S 1-2. Voies ferrées d’intérêt local. Ligne de Vesoul à Vauvillers. Exploitation. Stations et gares, 1903-1914
    224 S 1-2. Voies ferrées d’intérêt local. Ligne de Vesoul à Vauvillers. Exploitation. Stations et gares, 1903-1914
    Lieu de conservation : Archives départementales de la Haute-Saône, Vesoul - Cote du document : 224 S 1-2
  • L'Arbalète (train)
    L'Arbalète (train). Article consultable en ligne : (https://fr.wikipedia.org/wiki/L%27Arbal%C3%A8te_(train)
  • Ligne d'Aillevillers à Port-d'Atelier-Amance
    Ligne d'Aillevillers à Port-d'Atelier-Amance. Article consultable en ligne : https://fr.wikipedia.org/wiki/Ligne_d%27Aillevillers_%C3%A0_Port-d%27Atelier-Amance
  • Orient-Express
    Orient-Express. Article consultable en ligne : https://fr.wikipedia.org/wiki/Orient-Express
  • Cuynet, Jean. Histoire du rail en Franche-Comté, 1989
    Cuynet, Jean. Histoire du rail en Franche-Comté. - Saint Laurent du Var : La Régordane, 1989. 208 p. : ill.
    Lieu de conservation : Région Bourgogne-Franche-Comté, Inventaire et Patrimoine, Besançon - Cote du document : R Hi 3761
  • François, Max. Port d'Atelier : mémoire et témoignages. Récits de Madame Marcelle Garret, 2005
    François, Max. Port d'Atelier : mémoire et témoignages. Récits de Madame Marcelle Garret. [Faverney] : Association Animation et Loisirs de Port-d'Atelier, 2005. 98 p. : ill.
    Lieu de conservation : Bibliothèque municipale, Besançon - Cote du document : BR.A.184.15 et BR.A.181.11
  • Hamelin, Liliane ; Josso, Carole ; Boisnard, Patrick ; Déforet, Thomas. Faverney : petite cité comtoise de caractère, 2013
    Hamelin, Liliane ; Josso, Carole ; Boisnard, Patrick ; Déforet, Thomas. Faverney : petite cité comtoise de caractère. - Lyon : Lieux Dits, 2013. 88 p. : ill. (Parcours du patrimoine ; 384).
    Lieu de conservation : Région Bourgogne-Franche-Comté, Inventaire et Patrimoine, Besançon - Cote du document : R.US. 5118
  • Isabey, Henri ; Isabey, Renée. Faverney (Haute-Saône). Images d'autrefois, 1987
    Isabey, Henri ; Isabey, Renée. Faverney (Haute-Saône). Images d'autrefois. - [Faverney] : H. et R. Isabey, 1987. 59 p. : ill., carte.
    Lieu de conservation : Bibliothèque d'étude et de conservation, Besançon - Cote du document : Br 168.13
  • Mauclair, Michel. Le chemin de fer en Haute-Saône : histoire de 175 années de transports en zone rurale, 2005
    Mauclair, Michel. Le chemin de fer en Haute-Saône : histoire de 175 années de transports en zone rurale. - Langres : Dominique Guéniot, 2005. 2 vol., 464 p. : ill. ; 30 cm.
    Lieu de conservation : Bibliothèque municipale, Besançon - Cote du document : 78223.1 et 78812.1

Informations complémentaires

Thématiques :
  • petites cités comtoises de caractère
Dénomination : ensemble du génie civil
Parties constituantes non étudiées :
  • station de pompage
  • édicule non identifié
  • magasin de munitions
  • latrine
  • cantine
  • baraquement
  • maison
  • château d'eau
  • pont
Carte interactive
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